L'Union européenne a sanctionné jeudi plusieurs membres de l'administration présidentielle russe proches du président Vladimir Poutine. Bruxelles les a jugés responsables de l'empoisonnement en Russie de l'opposant Alexeï Navalny. Après être tombé gravement malade à bord d'un avion le 20 août, il est actuellement en convalescence en Allemagne.
L'Union européenne (UE) a imposé jeudi 15 octobre des sanctions à six proches du président russe Vladimir Poutine, gelant leurs avoirs et leur interdisant tout déplacement. Ces sanctions ont été prononcées en réponse à l'empoisonnement de l'opposant Alexeï Navalny en août 2020.
Après l'empoisonnement au Novitchok de l'ancien agent double russe Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia en mars 2018 en Angleterre, il avait fallu près d'un an pour que les Européens sanctionnent des agents du renseignement militaire russe.
Cette fois, poussée par la France et l'Allemagne, l'Union européenne a réagi très vite. En outre, les sanctions visent des membres du premier cercle, parmi lesquels Andreï Yarine, chef de la direction des affaires intérieures de l'administration présidentielle, et son premier adjoint, Sergueï Kirienko, précise la décision parue au Journal officiel de l'UE.
"Harcèlement" et "répression"
Soulignant que l'opposant a été "la cible d'actes systématiques de harcèlement et de répression par des acteurs étatiques et judiciaires de la Fédération de Russie [et que le Novitchok] n'est accessible qu'à des autorités étatiques de la Fédération de Russie", les Européens estiment qu'"il est raisonnable de conclure que l'empoisonnement d'Alexeï Navalny n'a été possible qu'avec le consentement de l'administration présidentielle".
Sont également concernés le directeur du service fédéral de sécurité, Alexander Bortnikov, le représentant de Poutine en Sibérie Sergueï Meniaïlo et deux vice-ministres de la Défense, Pavel Popov et Aleksei Krivoroutchko.
L'Institut d'État de recherche scientifique pour la chimie organique et la technologie (GosNIIOKhT), ayant la responsabilité de la destruction des stocks d'armes chimiques hérités de l'Union soviétique, figure aussi dans la liste au titre des personnes morales.
Le Royaume-Uni a parallèlement annoncé des sanctions contre le directeur du FSB, le service fédéral de sécurité russe, Alexandre Bortnikov.
"Le Royaume-Uni et ses partenaires conviennent qu'il n'y avait pas d'autre explication plausible à l'empoisonnement de M. Navalny qu'une implication et une responsabilité de la Russie", a expliqué la diplomatie britannique dans un communiqué.
De son côté, l'Italie attend de la Russie "une enquête approfondie qui clarifie le plus rapidement possible" les circonstances de l'empoisonnement d'Alexeï Navalny, a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Luigi Di Maio, dans un entretien publié jeudi par le quotidien La Repubblica.
Moscou compte riposter
À Moscou, le Kremlin a dénoncé des mesures "inamicales" qui ne resteront pas sans réponse. Le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a ajouté qu'il n'y avait aucune logique dans la décision des Européens.
"Avec cette décision, le Conseil de l'UE nuit aux relations avec notre pays", a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, annonçant que la réponse de Moscou "sera[it] conforme aux intérêts de la Russie".
"On ne peut que regretter cette décision qui fait dépendre les relations entre l'UE et Moscou d'une personne considérée en Europe comme le leader d'une opposition", a souligné Dmitri Peskov, en référence à Alexeï Navalny, bête noire du Kremlin dont le porte-parole ne prononce pourtant jamais le nom.
L'opposant russe Alexeï Navalny a été hospitalisé le 20 août dans un état grave à Omsk, en Sibérie, puis transféré le surlendemain à l'hôpital de la Charité, à Berlin. Il l'a quitté le 23 septembre au terme de 32 jours d'hospitalisation, dont 24 dans le coma.
L'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a confirmé qu'Alexeï Navalny avait bien été empoisonné par un agent neurotoxique du groupe Novitchok, une substance conçue par des spécialistes soviétiques à des fins militaires. De son côté, l'Allemagne a conclu à un empoisonnement à l'aide d'un agent innervant de la famille de ce poison neurotoxique.
Avec AFP et Reuters