
Un accord de cessez-le-feu dans le Haut-Karabakh est entré en vigueur samedi. Il a été annoncé par le ministre russe des Affaires étrangères à l'issue d'un entretien, à Moscou, avec ses homologues azerbaïdjanais et arménien et permettra un échange de corps et de prisonniers.
L'Azerbaïdjan et l'Arménie se sont accordés, samedi 9 octobre, sur un cessez-le-feu entré en vigueur à partir de midi heure locale (8 h GMT) dans la région séparatiste du Haut-Karabakh. C'est ce qu'a annoncé la Russie après des négociations marathon à Moscou entre les chefs des diplomaties arménienne et azerbaïdjanaise.
"Un cessez-le-feu est annoncé à partir de 12 heures 00 minutes le 10 octobre 2020 dans des buts humanitaires", a indiqué le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lisant un communiqué à l'issue des négociations.
"La France (coprésidente du groupe de médiateurs dit de Minsk, NDLR) salue l'annonce d'un cessez-le-feu humanitaire entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Il doit maintenant être mis en œuvre et respecté strictement afin de créer les conditions d'une cessation permanente des hostilités entre les deux pays", a déclaré samedi la porte-parole de la diplomatie française, Agnès von der Mühll.
Mais la situation dans la région séparatiste restait encore très tendue samedi matin : l'Arménie et l'Azerbaïdjan s'accusaient mutuellement de nouvelles attaques malgré la négociation d'une trêve entre les deux pays.
"Les forces azerbaïdjanaises ont lancé une attaque à 12 h 05", soit après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu à midi, a déclaré le ministère de la Défense arménien. "L'ennemi bombarde des zones habitées", a, pour sa part, indiqué le ministère de la Défense azerbaïdjanais, dans un communiqué publié 30 minutes après l'entrée en vigueur de l'accord.

Sergueï Lavrov a affirmé que le cessez-le-feu permettrait "d'échanger des prisonniers de guerre, d'autres personnes et les corps des tués en accord avec les critères du Comité de la Croix-Rouge".
L'Azerbaïdjan et l'Arménie se sont également engagés "à des négociations substantielles pour parvenir rapidement à un règlement pacifique" du conflit avec la médiation des co-présidents du groupe de Minsk de l'OSCE, a précisé Sergueï Lavrov. Les "paramètres spécifiques" de la mise en œuvre du cessez-le-feu seront convenus ultérieurement, a-t-il ajouté.
Longues négociations
Ces négociation ont duré plus de 10 heures et se sont terminées très tard dans la nuit de vendredi à samedi.
Dans un message sur son compte Facebook, la porte-parole de la diplomatie russe a évoqué des "négociations marathon" et a qualifié le ministre russe des Affaires étrangères de "maestro".
Avant le début des pourparlers, le président azerbaïdjanais Ilham Aliev avait affirmé donner une "dernière chance" à Erevan pour régler pacifiquement le conflit dans cette région montagneuse, revendiquée par les deux pays. "Nous retournerons de toutes façons sur nos terres", avait-il affirmé, lors d'un discours télévisé. Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian s'était dit, lui, prêt "pour la reprise du processus de paix".
En amont des pourparlers à Moscou, le Premier ministre russe Mikhaïl Michoustine avait rencontré son homologue arménien à Erevan vendredi.
Plus de 400 morts
Pendant les négociations à Moscou, un porte-parole de l'armée arménienne a affirmé à la presse que des combats avaient continué le long de la ligne de front. Vendredi, de nouvelles salves de roquettes et de nouvelles explosions ont ainsi été entendues à Stepanakert, la capitale séparatiste, par un journaliste de l'AFP sur place.
Dans son discours télévisé avant les pourparlers à Moscou, le président Aliev avait annoncé la prise de la ville de Hadrout, dans le sud du Haut-Karabakh, et de huit villages environnants. Des informations qualifiées de "délire" par un porte-parole de la présidence des séparatistes.

L'Azerbaïdjan se dit déterminé à reconquérir par les armes le Haut-Karabakh, une région séparatiste essentiellement peuplée d'Arméniens, et soutient que seul un retrait des troupes ennemies mettrait fin aux combats. Une première guerre entre 1988 et 1994 y avait fait 30 000 morts et des centaines de milliers de réfugiés. Le front est depuis resté figé, malgré des heurts récurrents.
Depuis la reprise des affrontements il y a 13 jours, le bilan officiel est monté à plus de 400 morts, dont 22 civils arméniens et 31 azerbaïdjanais. Il est cependant partiel et pourrait être bien plus élevé, chaque camp affirmant avoir éliminé des milliers de soldats ennemis. Bakou ne révèle pas ses pertes militaires.
À l'étranger, la crainte est de voir ce conflit s'internationaliser dans une région où Russes, Turcs, Iraniens et Occidentaux ont tous des intérêts. D'autant qu'Ankara encourage Bakou à l'offensive et que Moscou est lié par un traité militaire à Erevan. La Turquie est accusée de participer avec hommes et matériel aux hostilités aux côtés de l'Azerbaïdjan, ce qu'elle nie.
Avec AFP