
Dans l'ombre du Covid-19, ce 14-Juillet sera inédit pour Emmanuel Macron. Le président français répondra aux questions de deux journalistes mardi à 13 h 10, alors que le pays attend des réponses sur beaucoup de dossiers. Il devrait présenter un plan de relance majeur, avec de probables annonces pour les jeunes, l'environnement et contre les discriminations.
En 2017, lors de son premier 14-Juillet en tant que président de la République, Emmanuel Macron s'était contenté de quelques mots à la tribune. Cette année, dans un contexte de crise sans précédent, le président français renoue avec une vieille tradition, instaurée en 1978 par Valéry Giscard D'Estaing : l'interview en direct depuis l'Élysée. Le chef de l'État s'expliquera à partir de 13 h 10, pendant 45 minutes, sur son programme à venir.
Une occasion de fixer un cap pour les deux années qui restent. Car le président vise déjà la suite : sa candidature à la présidentielle de 2022. Pour cela, il va devoir regagner la confiance des Français et rassurer face à une triple crise : sanitaire, qui débouche sur une crise économique et sociale. Selon l'Insee, la France va plonger dans une récession de 9 % en 2020, du jamais-vu depuis 1948. Donc pour cette exercice périlleux que représente une interview en direct, face à deux journalistes, le président dressera son bilan et ses perspectives.
Justification de la gestion de crise
Emmanuel Macron sera d'abord sûrement interrogé sur sa gestion de la crise sanitaire. Sa gestion est critiquée tant par l'opposition que par certaines organisations ou par des particuliers. Des plaintes en justice ont même été déposées contre l'action du gouvernement.
"Le président pourrait reconnaître des erreurs sur la gestion des masques, puisque le gouvernement est accusé d'avoir menti aux Français en affirmant au début de la crise que les masques ne servaient à rien alors qu'en fait il n'y avait pas assez de masques", rappelle Bruno Daroux, chroniqueur international à France 24.
Le président sera attendu aussi sur son plan de défense en cas de rebond de l'épidémie : faudra-t-il rendre le masque obligatoire dans les lieux clos ? À moins qu'il ne laisse son Premier ministre se charger de répondre à cette question lors de son discours de politique générale, attendu le 15 juillet. "Mais globalement, Emmanuel Macron devrait défendre la gestion du gouvernement en disant que la stratégie de confinement choisie par le gouvernement a permis de sauver des dizaines de milliers de vie, malgré les 30 000 morts en France", prévoit Bruno Daroux.

La relance économique au centre de toutes les attentions
Mais c'est surtout la relance économique en cours qui fera l'objet de toutes les attentions. Après des mois de crise, le chef de l'État sait qu'il va devoir convaincre sur ces points. Il s'est donc mis au vert dans la résidence présidentielle de la Lanterne, à Versailles, dans les Yvelines, pour se préparer aux questions de Léa Salamé et Gilles Bouleau. Il aborde l'exercice avec un tout nouvel atout dans son jeu : la signature, lundi 13 juillet, d'un accord historique de 8 milliards d'euros en faveur de l'hôpital, dont 183 euros d'augmentation pour le personnel paramédical. Ce "Ségur de la santé" est le fruit de huit semaines d'intenses négociations entre les syndicats et le gouvernement. "Je m'y étais engagé, nous venons de le faire", a tweeté le chef de l'État.
Je m'y étais engagé, nous venons de le faire. Les carrières et salaires de nos personnels soignants qui ont tant donné pendant la crise sont revalorisés : https://t.co/qFvQWdQDhg
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) July 13, 2020Sur le plan de relance, quelques éléments ont déjà filtré. La priorité, a souligné dimanche le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, sera l'aide à l'emploi des jeunes. Plusieurs milliards devraient aussi être dévolus à la rénovation thermique des bâtiments, qui combine économie et environnement. Et pour inciter les entreprises à relocaliser, les impôts sur la production pourraient être réduits, avec compensation pour les régions qui les perçoivent.
Autre sujet délicat, la réforme des retraites, que le chef de l'État veut remettre en route malgré l'opposition des syndicats et du patronat. Les mêmes interrogations se posent pour la réforme de l'assurance-chômage, qui durcira les conditions d'allocations, et qu'Emmanuel Macron veut relancer.
La délicate affaire Darmanin
L’autre sujet sur lequel le président devra faire preuve de finesse, c’est la question des femmes. Alors qu'il avait fait de l'égalité femmes-hommes la "grande cause" du quinquennat, Emmanuel Macron devra aussi surement répondre aux critiques contre les nominations de Gérald Darmanin à l'Intérieur et d'Éric Dupond-Moretti à la Justice, l'un visé par une plainte pour viol, l'autre pour avoir déclaré que des femmes regrettent de ne plus être sifflées. Des associations féministes dénoncent un scandale et plusieurs manifestations ont été organisées en France depuis leur nomination.
En attendant de croiser le fer avec les journalistes, Emmanuel Macron a pu travailler son positionnement de rassembleur, en s'adressant aux militaires au ministère des Armées, le 13 juillet, depuis l'Hôtel de Brienne, à Paris. Il a salué "l'élan et le dynamisme" des soldats engagés dans la gestion de crise sanitaire et souligné : "Il nous faut rester vigilants, mais la vie a repris son cours". Une normalité qui reste très fragile et qu'une seconde vague de Covid-19 pourrait remettre en cause à tout moment. De quoi fragiliser aussi les 600 jours à venir.
Avec AFP