C'est aujourd'hui que les juges de la nouvelle Cour suprême britannique, qui a vocation à remplacer la commission des "Law Lords", prêteront serment. Une étape-clé de la réforme constitutionnelle lancée par l'ex-Premier ministre Tony Blair.
AFP - La nouvelle Cour suprême britannique se substituera la semaine prochaine à l'antique commission des "Law Lords" comme plus haute juridiction d'appel, mettant fin à une bizarrerie constitutionnelle et apportant un souffle de modernité à une institution opaque.
Lorsque la nouvelle Cour entrera officiellement en fonction, le 5 octobre, les 12 juges qui la composeront n'auront pas loin à aller: leurs nouveaux locaux sont situés dans un tribunal juste en face de la vénérable chambre des Lords où ils siègent actuellement.
Pour autant, l'ambiance devrait être à des années-lumières des dorures et des bancs de cuir rouge de la chambre des Lords, aux rangs souvent clairsemés et assoupis.
Les salles de la nouvelle Cour suprême sont modernes, lumineuses et spacieuses. Le public, qui sera autorisé à assister aux audiences, pourra admirer les tapis conçus par l'artiste Peter Blake, à l'origine notamment de la couverture du célèbre album des Beatles "Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band". Coût total de l'opération: 56 millions de livres (60 millions d'euros).
Les caméras de télévision seront elles aussi autorisées, une innovation dans un système judiciaire habitué à fonctionner en vase clos. De quoi donner un souffle de modernité et de transparence à un système souvent considéré comme impénétrable aux yeux du grand public, tout en corrigeant une aberration de la Constitution.
"C'est surtout symbolique mais je crois qu'à défaut de réforme on pourrait dire: +comment est-ce possible qu'un pays ait une Cour suprême qui soit une partie du système législatif", explique Roger Smith, directeur d'une association militant pour l'amélioration du système juridique britannique.
Depuis 1876, la plus haute juridiction d'appel du pays était incarnée par les "Law Lords", une commission de la chambre haute du Parlement composée de 12 magistrats de haut rang. Ils avaient notamment décidé en dernière instance la libération du dictateur chilien Augusto Pinochet pour raisons médicales, en 2000.
Même si leur indépendance n'a jamais été vraiment remise en cause, plusieurs ministres et avocats réclamaient depuis plusieurs années une séparation plus nette des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.
Cette réforme a été mise en oeuvre par les travaillistes sous Tony Blair, dans le cadre d'une réforme plus large de la constitution non-écrite du royaume qui s'est notamment traduite par l'octroi d'une plus grande autonomie à l'Irlande du Nord, l'Ecosse et au Pays de Galles, ainsi qu'une réduction du nombre de pairs héréditaires aux Lords.
Les 12 "Law Lords" qui vont constituer la nouvelle Cour suprême ont été reconduits, mais leurs successeurs seront nommés par une commission indépendante et ils ne seront pas membres de la chambre des Lords.
Avec des audiences publiques voire télévisées, la nouvelle Cour pourrait aussi contribuer à rapprocher le système judiciaire du grand public.
"Avec le temps, la cour va devoir expliquer sa façon de travailler et de penser de façon beaucoup plus publique que par le passé", relevait en juillet le quotidien The Guardian. "Petit à petit, les juges (...) vont devenir des personnages plus familiers aux yeux du public, ce qui ne peut être qu'une bonne chose pour la vie publique".