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Covid-19 : face au nombre de contagions en hausse, la capitale chilienne se confine

Santiago du Chili s'est réveillée samedi en confinement total, une mesure ordonnée par le gouvernement après un bond des nouveaux cas de coronavirus et du nombre de morts quotidiens ces derniers jours. La gestion des autorités donne lieu à de vives critiques.

Le nombre de contagions s’est envolé au Chili et les alertes se sont fait entendre au sein de la société chilienne. Surtout chez les citoyens et les institutions qui n’ont de cesse, depuis deux mois, de demander des mesures plus extrêmes et une quarantaine totale dans le pays, en refusant de croire le discours officiel selon lequel la situation était sous contrôle.

Mercredi 13 mai, le choc a été énorme à l'annonce par le ministre de la Santé, Jaime Mañalich de 2 660 nouveaux cas, soit une flambée de 60 % en 24 heures. Jusqu'à la semaine dernière, le pays sud-américain enregistrait 350 à 500 nouveaux cas par jour. Le nombre de morts quotidiens a lui doublé en deux jours, passant de de 11 mercredi à 26 vendredi. Le Chili compte à ce jour près de 40 000 cas et déplore 394 décès..

Le système hospitalier atteint ses limites par endroits : si les lits en soins intensifs connaissent un taux d’occupation de 78 % à l’échelle nationale, les chiffres oscillent, selon les zones, entre 84 % et 94 % pour la région métropolitaine de la capitale Santiago, où habitent environ 7 millions des 18 millions d’habitants du pays. Les médias locaux proposent des reportages montrant des ambulances contraintes d’attendre plusieurs heures avant que les patients ne soient pris en charge. La gravité de la situation a amené les autorités à transférer des patients vers différentes régions du pays.

L’annonce de l’arrêt des test PCR par le réseau des cliniques privées constitue un autre motif d’inquiétude pour la population locale. Les stocks sont épuisés et les laboratoires, surchargés de travail, ne parviennent plus à analyser les prélèvements effectués.

La gravité de la situation a amené le gouvernement à adopter la mesure la plus restrictive depuis l’annonce du premier cas de Covid-19 sur le territoire le 3 mars : le confinement total de la région de Santiago, entré en vigueur dans la nuit de vendredi à samedi. Il est initialement prévu pour une période d'une semaine. Un couvre-feu a également été décrété dans tout le pays à compter de 22 heures. Près de 15 000 membres des forces de police et de l’armée seront chargés de faire respecter ce confinement.

Une leçon pour le gouvernement

"Ce soir, nous entrons dans l'étape la plus dure, où est nécessaire la plus grande solidarité, le plus grand contrôle les uns des autres. Utilisez, s'il vous plaît, le masque, ne sortez pas dans cette situation", a lancé vendredi le ministre de la Santé. "C'est la responsabilité de chacun et aussi de la société de parvenir à ce que la population respecte les mesures de confinement", a-t-il ajouté.

Les mesures de confinement dépendaient jusque-là des décisions adoptées par les différentes communes de cette région métropolitaine. Et dans certains quartiers, des mesures de confinement avaient été appliquées très tôt. Dans les rues et les rangs de l'opposition, les voix s'élèvent pour critiquer le président, Sebastian Piñera. Avec, en toile de fond, l'explosion sociale sans précédent, en trente ans de démocratie, qu'a connue le Chili ces derniers mois : une vague de manifestations réclamant plus d'égalité sociale et plus d'État.

"Le manque de confiance réciproque nous a joué un mauvais tour", a reconnu le ministre Mañalich jeudi auprès du journal La Tercera, alors que les chiffres du coronavirus s'emballaient : "Dire aux gens qu'ils doivent avoir confiance dans ce que leur dit l'État, c'est très difficile".

C'est aussi une leçon pour le gouvernement, qui s'était montré optimiste quand les chiffres semblaient s'améliorer fin avril. Le président Piñera et plusieurs maires avaient alors donné des signes de reprise de l'activité économique, avec la réouverture de centres commerciaux et le retour au travail des fonctionnaires.

Les experts, eux, avaient appelé à la prudence, jugeant prématuré de crier victoire alors que l'épidémie commençait à toucher les quartiers les plus pauvres et les plus peuplés de Santiago. À commencer par Izkia Siches, présidente de l’Ordre des médecins, qui réclame "un changement dans la gestion de cette pandémie". Dans une interview accordée à la radio Bio Bio, elle estime que les recommandations formulées par les professionnels de santé ne sont pas prises en compte. "Nous ne pouvons pas continuer à parler à un mur", a-t-elle déclaré.

La situation est d’autant plus préoccupante en raison de la géographie de Santiago, entourée de montagnes, et de l’approche de l’hiver austral. Car les maladies respiratoires font traditionnellement déborder le système sanitaire public entre les mois de juin et de septembre.

Avec AFP