
Des rues sans voiture : pas de bruit, ni de gaz d'échappement... Avec la crise du Covid-19, nous avons un aperçu de ce que seraient des villes débarrassées des voitures. Pendant ce temps, le vélo, moyen de locomotion propre, peu cher et parfait pour la distanciation sociale, a conquis l'espace urbain dans de nombreux pays. De façon temporaire ou permanente, nous avons aujourd'hui l'opportunité du siècle pour changer nos modes de transport. Demain, des villes à vélo ? C'est le thème de cette émission spéciale d'"Élément Terre".
À l'heure du déconfinement, plusieurs grandes villes, comme Bogota, Berlin ou encore Milan, construisent des pistes cyclables temporaires. Les maires en sont sûrs, leurs habitants vont éviter les transports en communs bondés. La France aussi suit le mouvement : Toulouse et Montpellier ont été les premières villes à construire des "coronapistes".
Alors que le virus est encore parmi la population, beaucoup estiment que le vélo est le moyen le plus sûr pour se déplacer sur de courtes à moyennes distances. Mathieu Chassignet, ingénieur à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et habitué du vélo, s’en réjouit. "C’est une opportunité contrainte de mettre un coup d’accélérateur au développement du vélo, à ce que les collectivités avaient prévu de faire d'ici cinq à dix ans : un grand réseau de pistes cyclables continu et sécurisé. C’est l’occasion de le mettre en place en quelques mois." D’autant plus qu’avec le déconfinement, des mesures de distanciations sociales vont être imposées dans les bus, tramway et métros. On estime que la capacité des transports collectifs va être au moins divisée par deux.
Autour de Paris, ces contraintes donnent des ailes au projet Réseau Express Régional Vélo, le "RER V" pour les intimes. Un programme à 500 millions d’euros, financé à 60 % par la région Île-de-France, qui vise à construire 650 kilomètres de pistes cyclables sécurisées, répliquant la carte du métro et du RER. Un réseau qui permettrait de connecter Paris à la banlieue et d’éviter une paralysie sur les routes.
La situation rappelle celle de la grève à l’hiver 2019 où, par obligation, beaucoup ont adopté le deux-roues pour se déplacer. "Souvent le vélo a besoin d’événement comme ceux-là, de rupture, pour se développer. Pendant les grèves à Paris, l’usage du vélo a été multiplié certains jours par trois, alors qu’il faisait froid ou moche. Là, on arrive à la fin du printemps, on va avoir l’été. Je suis persuadé qu’il y aura énormément de gens qui vont se mettre au vélo", explique Mathieu Chassignet.
Aux Etats-Unis, cette reconquête de la ville par le vélo est appelé "slow streets". Des rues rendues aux habitants, où la voiture a accepté de laisser un peu de son espace. On l’espère, pour longtemps.