
Asia Bibi reçoit ce mardi des mains de la maire Anne Hidalgo le diplôme d'honneur de la Ville de Paris. Libre depuis novembre 2019, cette chrétienne pakistanaise avait été condamnée à mort dans son pays pour blasphème.
À l’étranger, le pape Benoît XVI demande à la justice pakistanaise de revoir ce jugement. Mais son intervention embrase le pays et les partis religieux les plus radicaux organisent des manifestations pour dénoncer l’ingérence de l’Église catholique dans les affaires pakistanaises.
La journaliste française, Anne-Isabelle Tollet, correspondante au Pakistan, notamment pour France 24, s’empare de la cause et remue ciel et terre pour faire libérer Asia Bibi. "Cette bataille m’a conduite à prendre la parole aux Nations unies, à New York et à Genève. Le Parlement européen a fait voter une résolution de soutien à Asia Bibi. Les maires de Paris, Madrid, Bordeaux, Le Mans, La Flèche, La Brède ont été sensibles à mon appel", écrit la reporter.
Tour à tour, les présidents Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron demandent sa libération. Ces soutiens finissent par payer. Asia Bibi est acquittée en octobre 2018. Une décision de la Cour suprême qui jette dans la rue des milliers de membres du parti islamiste Tehreek-e-Labaik (TLP). Pendant trois jours, ils bloquent les axes routiers du pays pour exiger sa pendaison ainsi que celle des juges qui ont pris la décision. Asia Bibi évite de peu le retour en prison.
"Après trois jours d’une quasi-guerre civile, le gouvernement pakistanais a fait volte-face en signant un accord, le 3 novembre, avec les fanatiques religieux pour empêcher Asia Bibi de quitter le territoire", précise Anne-Isabelle Tollet. Mais Asia Bibi est exfiltrée de sa prison dans la nuit du 7 novembre et parvient à quitter le pays six mois plus tard pour rejoindre sa famille au Canada.
Entre résilience et engagement
Elle vit aujourd’hui au Canada, dans un lieu tenu secret, et espère obtenir l’asile en France. Emmanuel Macron, qu’elle doit rencontrer vendredi, s’est déjà exprimé favorablement sur le sujet.
Résiliente, l’ancienne détenue a déclaré sur franceinfo avoir tout pardonné. Anne-Isabelle Tollet décrit un "petit bout de femme forte, intelligente et courageuse". Une femme dont la voix "ne tremble pas et qui, malgré les épreuves et la souffrance, est puissante, vive, pétillante". Une énergie qu’elle veut mettre à aider ceux qui, comme elle, sont accusés de blasphème.
Aujourd’hui, son ancienne cellule, dans la prison de Multan, est occupée par une autre chrétienne. Kausar Shagufta, mère de quatre enfants et, comme Asia, illettrée, est accusée d’avoir envoyé des SMS blasphématoires en anglais. Elle et son mari sont condamnés à mort.