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Premier passage obligé de tous les candidats démocrates, l’État de l’Iowa est courtisé avec une attention particulière. Mais les résultats sont difficiles à prévoir à cause de l’indécision des électeurs et de la possibilité pour certains de faire un second choix lors du vote. Reportage.

Pendant les prochaines 24 heures, le monde nous regarde, ici en Iowa." En cette veille de caucus démocrates, l’ex-gouverneur de l’Iowa, Tom Vilsack, présente le candidat qu’il a choisi : Joe Biden. Les habitants de cet État du Midwest seront les premiers, lundi 3 février, à départager les prétendants démocrates à la Maison Blanche. Et ils en sont particulièrement fiers. "Tous les quatre ans, la démocratie commence ici, dans cet État", rappelle l’ex-vice-président de Barack Obama sur une scène de fortune installée dans un gymnase de Des Moines.

L’arrivée de @JoeBiden sur scène à Des Moines. #IowaCaucuses pic.twitter.com/BNXoeupkZE

— Yona Helaoua (@YonaHelaoua) February 3, 2020

L’Iowa, petit État d’un peu plus de trois millions d’habitants, voit donc à chaque cycle électoral débarquer des milliers de politiques et de journalistes. Seulement 41 délégués sont en jeu sur les plus de 4—000 qui désigneront officiellement cet été l’adversaire de Donald Trump. Mathématiquement, un candidat peut donc très bien perdre ces caucus mais cumuler le plus de délégués in fine. Mais l’important est ailleurs : l’Iowa permet de donner un élan précieux au gagnant. En 2008, un petit candidat dénommé Barack Obama, sur lequel peu pariaient, avait ravi la victoire ici. Tout le monde connaît la suite.

Les derniers sondages montrent que le modéré Joe Biden et le socialiste Bernie Sanders sont au coude-à-coude localement. À ceci près que la moitié des électeurs sont indécis. "Si vous n’êtes pas décidés, j’espère que vous le serez enfin ce soir. Et si vous l’êtes déjà, allez convaincre deux de vos voisins en sortant tout à l’heure", implore au micro la sœur de Joe Biden. Certains réfléchissent au meilleur programme. D’autres votent pour le candidat qu’ils estiment le plus à même de gagner. D’autres encore n’ont tout simplement pas eu le temps de se renseigner. "Il faut que j’étudie un peu les profils", s’excuse Debbie, serveuse dans un "diner" du coin. Elle avoue toutefois un penchant pour les candidats modérés comme Joe Biden, Amy Klobuchar et Pete Buttigieg.

Caucus démocrate : l’Iowa, la délicate étape pour les prétendants à la Maison Blanche

Un deuxième choix crucial

Ce dernier, un maire et ex-vétéran de 38 ans qui mise sur la fraîcheur et le renouveau, compte bien ravir le vote de ceux qui doutent. Et piquer quelques voix à Joe Biden au passage. "Je sais que les publicités à la télé affirment que ça n’est pas le moment de prendre un risque sur un nouveau candidat", reconnait-il, en meeting à Des Moines, avant d’inviter le public à "ne pas avoir peur".

Avec son slogan « Tourner la page », @PeteButtigieg fait le pari de la fraîcheur : « Je sais qu’il y a des pubs à la télé disant que ça n’est pas le moment de prendre un risque sur un nouveau candidat. » Lui incite au contraire le public à ne pas « avoir peur ». #IowaCaucus pic.twitter.com/qK6gR5vrRD

— Yona Helaoua (@YonaHelaoua) February 2, 2020

Le mode de scrutin ajoute encore un peu plus au suspense. Car les électeurs de l’Iowa ont une chance que d’autres n’ont pas : lundi soir, certains pourront faire deux choix. Et le deuxième sera crucial. Les caucus obéissent en effet à des règles complètement différentes de celles des primaires. Ici, pas question de bulletin de vote ou d’isoloir. Les électeurs se réunissent dans une salle puis se divisent par groupes d’affinité. C’est le moment où chacun tente de convaincre son voisin. Si le groupe d’un candidat n’atteint pas 15 % des participants, il est éliminé. Ses membres ont alors la possibilité de rejoindre un autre groupe. Le gagnant peut donc très bien devoir sa victoire à des électeurs qui ne l’ont pas choisi de prime abord.

Caroll George, la cinquantaine, a choisi Pete Buttigieg. Elle sera même chef de groupe lors des caucus lundi soir. Rencontrée au meeting de son candidat, elle admet n’avoir arrêté son choix que jeudi. "J’étais plutôt pro-Warren au début", reconnait-elle au sujet de la prétendante progressiste qui fait partie du quatuor de tête. Elizabeth Warren sera dorénavant son second choix.

Bernie Sanders plus isolé que prévu ?

Et parfois, ce second choix ne coule pas forcément de source. Les partisans d’Elizabeth Warren, dont le programme est très similaire à celui de Bernie Sanders, ont plutôt d’autres alternatives en tête que le sénateur anti-establishment. C’est le cas de Mike Kaldenberg, informaticien des environs de Des Moines qui opterait pour Pete Buttigieg si le groupe de la sénatrice du Massachusetts n’atteignait pas les 15 % dans son bureau de vote lundi soir. "Pete est un ancien militaire, comme moi", raisonne-t-il.

Le jeune Knox Fanelli, lui, préfère un centriste comme Joe Biden en second choix plutôt que Bernie Sanders. "Warren et Biden, une fois au Bureau Ovale, arriveront bien plus facilement à faire passer des lois au Congrès que Sanders qui est un ennemi invétéré du Parti républicain. Et Bernie pourrait diviser le Parti démocrate au point qu’il explose", prévient-il.

En attendant @ewarren #IowaCaucus Beaucoup nous disent qu’ils adorent #Warren mais qu’ils ne se tourneront pas vers #Sanders en second choix même si leurs programmes sont proches. Pour eux, la candidature anti-establishment de Sanders sème la division au Parti démocrate. pic.twitter.com/bvKEuNGc9E

— Yona Helaoua (@YonaHelaoua) February 2, 2020

Bernie Sanders, lui, compte plus que jamais sur une victoire lundi soir. Mais si le socialiste ne peut pas compter sur un report de voix suffisant de sa collègue progressiste Elizabeth Warren, il devra faire le plein de partisans dès le premier choix. Bien conscient du problème, le sénateur du Vermont a résumé la situation ainsi face à une foule d’étudiants ce week-end : "Si la participation est faible, nous allons perdre."

Caucus d'Iowa : qui sont les candidats ?

L’Iowa donne le coup d’envoi officiel des primaires démocrates. Des 24 candidats qui se sont lancés dans l’aventure, ils ne sont désormais plus que 11 sur la ligne de départ électorale.

  • L’ancien vice-président Joe Biden, les sénateurs Bernie Sanders et Elizabeth Warren ainsi que le maire de l’Indiana, Pete Buttigieg, font actuellement figures de favoris.
  • Les milliardaires Michael Bloomberg et Tom Steyer, les sénateurs Amy Klobuchar et Michael Bennet, le jeune entrepreneur Andrew Yang ainsi que la représentante d’Hawaï, Tulsi Gabbard, et le gouverneur Deval Patrick espèrent tirer leur épingle du jeu pour rester dans la course.