
Les tirs de missiles iraniens visant des soldats américains en Irak marquent une nouvelle étape dans l'affrontement entre l'Iran et les États-Unis et pourraient être suivis par d'autres actions, selon le spécialiste du Moyen-Orient David Rigoulet-Roze.
En répondant à l'assassinat du général Soleimani par des tirs de missiles revendiqués contre des bases militaires irakiennes abritant des soldats américains, l'Iran a directement attaqué les États-Unis, faisant craindre le pire pour la région.
Les deux pays vont-ils poursuivre dans l'escalade ? Pour David Rigoulet-Roze, enseignant et chercheur rattaché à l'Institut français d'analyse stratégique (Ifas), rédacteur en chef de la revue Orients stratégiques, il faut s'attendre à d'autres actions de Téhéran. Ce spécialiste du Moyen-Orient souligne notamment que le guide suprême Ali Khamenei a affirmé, mercredi 8 janvier, que les frappes de la nuit dernière n'était qu'une "gifle" et que "la vengeance implacable" de l'Iran viendrait "plus tard".
France 24 : Après les tirs de missiles de l'Iran la nuit dernière, peut-on parler de guerre ouverte entre Washington et Téhéran ?
David Rigoulet-Roze : Ce n'est pas une guerre ouverte au sens conventionnel du terme. La grande nouveauté, c'est qu'il y a désormais une confrontation de plus en plus directe alors qu'elle passait auparavant par des "proxies", c'est-à-dire des groupes armés affiliés à l'Iran dans la région. Que ce soit pour les pétroliers endommagés ou l'attaque d'installations pétrolières stratégiques saoudiennes le 14 septembre, revendiquée officiellement par les rebelles houthis du Yémen, il est difficile de prouver qui était réellement à la manœuvre, même si beaucoup des regards se tournaient vers l'Iran. C'est la stratégie du "deniability", c'est-à-dire du déni plausible, qui permet de s'exonérer des responsabilités éventuelles. Avec l'assassinat de Soleimani par les États-Unis, puis la réponse iranienne par des tirs de missiles balistiques contre des bases militaires, on passe un seuil inédit : pour la première fois, il y a une revendication officielle de l'Iran.