Le ministre de l'Immigration, Éric Besson, a annoncé, mercredi, son intention de démanteler la "jungle" de Calais, où des candidats à l'immigration vers la Grande-Bretagne ont trouvé refuge. Reportage auprès des migrants.
Faire évacuer le campement de sans-papiers au nord-est de Calais, surnommé la "jungle" par les migrants, "avant la fin de la semaine prochaine" : l’annonce du ministre français de l’Immigration, Eric Besson, mercredi soir, a suscité nombre de débats dans le monde associatif de l’Hexagone. L’objectif du gouvernement est de "casser le principal outil de travail des filières clandestines dans la région", selon les mots du ministre. Cette annonce "signifie simplement tenter de rendre invisible un problème qui perdurera, se renouvellera et se déplacera", réplique le collectif Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) dans un communiqué publié jeudi soir.
Depuis la fermeture du hangar de Sangatte, en 2002, par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, des centaines de migrants ont établi un campement de fortune dans cet espace sablonneux situé aux abords de la zone industrielle de Calais.
La décision gouvernementale se justifie, explique la maire UMP de Calais, Natacha Bouchart, par la multiplication, ces dernières semaines, d’"agressions graves". "Ce que je souhaite c'est qu'à travers ce plan, les passeurs et les migrants soient bien informés que Calais n'est plus une zone de non-droit et qu'ils ne peuvent plus faire ce qu'ils veulent comme ils le veulent", a déclaré l’édile à l’AFP.
"Ces migrants ne sont pas des délinquants"
"Bien sûr, les migrants sont victimes de violences, parfois entre eux, parfois de la part de passeurs, parfois de la police. Mais ils n’exercent pas de violences vis-à-vis de la population de Calais. Ce n’est pas notre observation", réplique sur FRANCE 24 Patrick Delouvin, responsable de la section France d’Amnesty International et membre de la CFDA. "On marche sur la tête", renchérit Philippe Lioret, réalisateur du film "Welcome" qui met en scène un jeune Kurde cherchant à traverser la Manche à la nage depuis Calais. "Ces migrants ne sont pas des délinquants."
Le ministère de l’Immigration met en avant la diminution du nombre de migrants présents dans la "jungle", de 800, il y a quelque mois, à environ 300 aujourd'hui, pour justifier son geste. Des chiffres que contestent plusieurs observateurs sur le terrain. "Ils étaient entre 500 et 700 à Calais en 2002, ils sont entre 500 et 700 aujourd’hui", indique Philippe Lioret. Au total, près 2000 personnes, ressortissants de dizaines de pays - Afghanistan, Erythrée, Somalie, Soudan, Iran, Nigéria ou Irak - sont recensées dans l’ensemble de la région de Calais.
L’annonce d’Eric Besson a en revanche reçu un écho favorable au Royaume-Uni. "Le ministère britannique de l’Intérieur se félicite de la décision des autorités françaises", rapporte Bénédicte Paviot, correspondante de FRANCE 24 à Londres. "Les autorités britanniques pensent qu’il est important de mettre fin au trafic illégal d’êtres humains, de ne pas laisser penser qu’ils peuvent avoir une vie meilleure en Grande-Bretagne."