Des manifestants ont incendié, mercredi soir, le consulat d'Iran dans la très symbolique ville sainte chiite de Najaf, dans le sud de l'Irak, en proie depuis deux mois à sa plus grave crise sociale depuis des décennies.
La contestation en Irak, qui a déjà fait 350 morts en deux mois, a atteint, mercredi 27 novembre, un palier inédit. Des manifestants ont incendié le consulat d'Iran à Najaf, au terme d'une nouvelle journée meurtrière d'un mouvement rejetant le pouvoir à Bagdad et son parrain, Téhéran.
En soirée, au milieu de hautes flammes qui dévoraient l'emblème de la République islamique sur le mur d'enceinte de la représentation diplomatique, des centaines de jeunes criaient "Iran dehors" et "victoire à l'Irak" à l'intérieur même du complexe diplomatique, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Cet incendie dans la très symbolique ville sainte chiite de Najaf, qui accueille chaque année des millions de pèlerins chiites principalement iraniens, marque un tournant.
Couvre-feu
Jeudi, au lendemain de l'incendie, les rues de Najaf étaient relativement désertes, les autorités y ayant décrété un couvre-feu et une journée chômée pour l'ensemble des fonctionnaires.
L'Iran a demandé à l'Irak de prendre des mesures décisives contre les "agresseurs". Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Abbas Mousavi, cité par l'agence de presse officielle IRNA, a condamné l'attaque et "a exigé une action décisive, efficace et responsable contre les agents destructeurs et les agresseurs".
Le consulat d'Iran à Najaf n'est pas le premier à faire l'objet d'attaques. En début de mois, le consulat présent dans l'autre ville sainte du pays, Kerbala, avait déjà concentré la colère des manifestants, mais les forces de sécurité irakiennes avaient répliqué, faisant quatre morts.
Des couvertures, cartons et pneus enflammés jetés dans le consulat d'Iran
Cette fois-ci, sous les poussées de centaines de manifestants, leurs grenades lacrymogènes ont fait une cinquantaine de blessés, selon des sources médicales et elles ont fini par se retirer alors que les manifestants affûtaient leurs armes.
Ils ont amené des couvertures, des cartons, des pneus, tout ce qui leur tombait sous la main, les ont incendiés, puis jetés sur le bâtiment, visiblement déserté.
Si les manifestants ont visé en particulier ce bâtiment c'est parce qu'ils accusent Téhéran de tirer les ficelles en Irak. Pour eux, dans l'un des pays les plus riches en pétrole du monde, mais aussi l'un des plus corrompus, le système politique conçu par les Américains qui ont renversé Saddam Hussein en 2003 est à bout de souffle.
Et surtout, il est tombé entre les mains de l'Iran et de son puissant émissaire pour les affaires irakiennes, le général Qassem Soleimani, en charge des opérations extérieures de l'armée idéologique de la République islamique.
Dans la rue depuis le 1er octobre, des dizaines de milliers d'Irakiens réclament la refonte du système politique et le renouvellement total de leur classe dirigeante qu'ils jugent corrompue. Officiellement, 410 milliards d'euros ont été détournés ces 16 dernières années, soit deux fois le PIB du pays.
Avec AFP