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Le prix Médicis a été attribué à Luc Lang pour "La Tentation", tandis que l'Islandaise Audur Ava Olafsdottir a remporté le Médicis étranger pour "Miss Islande" et que Bulle Ogier et Anne Diatkine ont remporté le Médicis essai pour "J'ai—oublié".

Le romancier Luc Lang, finaliste malheureux du Femina, a remporté, vendredi 8 novembre, le prix Médicis pour "La Tentation" (Stock), roman sombre et puissant qui raconte, à hauteur d'homme, l'histoire d'un monde en train de s'effondrer, a annoncé le jury.

Le Médicis étranger a été attribué à l'Islandaise Audur Ava Olafsdottir pour "Miss Islande", traduit de l'islandais par Éric Boury (Zulma). Le Médicis essai a été attribué à Bulle Ogier et Anne Diatkine pour "J'ai oublié" (Seuil).

Le héros de "La Tentation", François, la cinquantaine, est un chirurgien renommé. Chasseur, on le découvre au début du roman en Savoie tenant dans sa ligne de mire un grand cerf à seize cors. François hésite, tire et blesse l'animal.

Est-ce là que tout commence à basculer ? François choisit de soigner l'animal plutôt que de l'achever. Alors qu'il s'apprête à rejoindre l'animal blessé, une voiture surgit brutalement sur la petite route de montagne. Dans l'habitacle, François croit voir le visage apeuré de sa fille.

François est père de deux enfants. Mathieu, son fils exilé à New York, est financier international adepte de placements à risques. Mathilde, sa fille, a abandonné ses études de médecine pour suivre un golden-boy, client de son frère, peu scrupuleux. À travers ses enfants, François est le témoin d'un monde, le sien, en train de disparaître.

Quelle place pour des valeurs devenues ringardes comme l'humanisme, la compassion ou la charité ?

Luc Lang, Goncourt des lycéens en 1998, nous raconte depuis des années à travers ses romans la fin des illusions. Dans un monde où l'argent est roi, quelle place reste-t-il pour des valeurs devenues ringardes comme l'humanisme, la compassion ou la charité? "Le capitalisme universel est devenu la réalité et nous laisse sans recours", déplorait-il lors de sa rencontre avec l'AFP.

Dans le monde cupide et sans affect incarné par ses enfants, François le chasseur, François l'honnête homme au sens qu'il avait au XVIe siècle, n'est-il pas devenu la proie comme le cerf qu'il tenait dans sa ligne de mire ?

L'écrivain, qui aime les mots rares, écrit avec la précision du chirurgien maniant son scalpel. En lisant son roman, on pense évidemment à la "tentation du désespoir" de Bernanos.

Le roman s'achève dans une explosion de violence, une apocalypse où, étrangement, l'espoir demeure. "Je voulais une apocalypse joyeuse", avait confié l'écrivain. Une apocalypse comme une rédemption.

Avec AFP