
La Commission des plaintes électorales a commencé à annuler tous les bulletins récoltés dans les bureaux de vote où des fraudes sont avérées. Si 400 000 sont invalidés, un second tour pourrait avoir lieu.
REUTERS - La commission des plaintes, formée de membres désignés par l'Onu, a commencé jeudi à invalider les résultats de certains bureaux de vote après l'élection présidentielle afghane du 20 août, processus qui pourrait entretenir l'incertitude politique pendant des mois.
En l'état, les résultats préliminaires créditent le président sortant, Hamid Karzaï, de 54% des suffrages exprimés, soit un score suffisant pour lui épargner un second tour face à son rival, l'ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah.
Mais les accusations de fraude électorale ont sapé la confiance des puissances occidentales dans un processus électoral dont elles avaient dans un premier temps vanté le succès.
La Commission des plaintes (ECC), organisme indépendant qui peut invalider un résultat, dit disposer de "preuves claires et convaincantes" des irrégularités dénoncées depuis le vote et a ordonné un nouveau décompte partiel des suffrages.
Sont concernés les bureaux de vote où un candidat a recueilli plus de 95% des voix et ceux où le nombre de bulletins enregistrés excèdent le maximum possible de 600.
Dans un communiqué diffusé jeudi, la commission que dirige le Canadien Grant Kippen précise avoir invalidé la totalité des suffrages recensés dans 17 bureaux de vote de la province de Ghazni, au sud-ouest de Kaboul.
La commission ne dit pas combien de votes ont été jusqu'à présent annulés. Sur la base des derniers résultats préliminaires, il faudrait que 400.000 suffrages soient invalidés pour qu'un second tour entre Karzaï et Abdullah ait lieu.
ABDULLAH MET EN GARDE CONTRE L'INSTABILITÉ
Le président afghan a réaffirmé que le scrutin avait été honnête et impartial. Mais les décisions prises par la Commission des plaintes ont galvanisé le camp Abdullah, qui y trouve une justification de ses accusations de fraude et de tricheries.
"Je ne m'adresse pas seulement à mes partisans, mais à ceux qui ont voté pour M. Karzaï : leur vote fait désormais partie d'une fraude. Et, au-delà, d'un résultat frauduleux : un régime illégitime pour cinq années de plus", a dit Abdullah dans une interview accordée jeudi à la BBC.
"A mon sens, on a là les ingrédients réunis pour l'instabilité dans ce pays", a-t-il ajouté.
La commission des élections devrait diffuser ses résultats préliminaires complets samedi, a indiqué un porte-parole.
"Si les 'preuves claires et convaincantes de fraudes' réunies par l'ECC ne sont pas réglées, il sera impossible de déterminer la volonté exprimée par le peuple afghan", estime l'Institut démocrate national, une ONG américaine qui a observé le déroulement du vote.
"Le processus électoral n'a pas été mené à son terme et il est essentiel que la communauté internationale continue d'en observer toutes les étapes", poursuit l'institut dans un communiqué.