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Le Maroc s'ouvre aux langues étrangères dans l'enseignement

La classe politique marocaine est depuis longtemps divisée sur la question de l'enseignement de certaines matières en français, notamment dans les rangs du parti islamiste à la tête du gouvernement, qui invoque la défense de l'identité nationale.

C'est un premier pas pour l'ouverture des langues étrangères dans l'enseignement au Maroc. Lundi 22 juillet, la première chambre du Parlement marocain a adopté à la majorité la loi-cadre portant sur la réforme de l'éducation qui a longtemps divisé la classe politique. Les députés du Parti justice et développement (PJD, islamiste), qui dirige la coalition gouvernementale, se sont toutefois abstenus.

Le texte émane du Conseil supérieur de l'éducation, organisme consultatif chargé d'élaborer une "vision stratégique" pour une "école d'équité". Il prévoit l'enseignement de certaines matières, notamment scientifiques, en langues étrangères (principalement le français).

Sa première adoption en conseil des ministres, mi-2018, avait déjà suscité de fortes résistances au nom de la défense de l'identité nationale.

Les désaccords ont ressurgi en avril au Parlement, durant un premier examen de la loi-cadre, provoquant plusieurs renvois. Le texte opposait le PJD et l'Istiqlal, qui défendent traditionnellement l'arabe – la langue du Coran –, aux autres partis, favorables à une ouverture linguistique.

"Abandonner l'arabe pour la langue de la colonisation"

Ces derniers jours, il a révélé des divisions profondes dans les rangs du PJD : l'ancien chef du gouvernement issu du PJD Abdelillah Benkirane, toujours populaire au sein de sa formation, a fustigé samedi un "scandale" dans une vidéo diffusée sur sa page Facebook, suivie par 300 000 personnes.

"Comment un parti au référentiel islamique peut-il abandonner l'arabe pour le remplacer par la langue de la colonisation ?", s'est indigné Abdelillah Benkirane.

Le même jour, le chef du groupe parlementaire du parti islamiste présentait sa démission, selon les médias marocains.

L'objectif de la mesure sur les langues est de mieux préparer les élèves à l'enseignement supérieur, dispensé en français dans la plupart des spécialités. L'arabe et l'amazigh (berbère) sont les deux langues officielles, mais le français est largement utilisé dans le monde du travail. Le Maroc comptait en 2018 quelque 12,7 millions de locuteurs français sur ses 35 millions d'habitants.

L'arabisation de l'enseignement est intervenue au Maroc au début des années 1980, notamment pour renforcer le rôle des conservateurs et islamistes face à une gauche contestataire.

Beaucoup de responsables politiques, y compris pro-arabisation, inscrivent cependant leurs enfants dans des écoles étrangères payantes.

Selon l'Unesco, le Maroc fait partie des 25 pays les moins avancés du monde en termes de scolarisation, avec un taux d'analphabétisme d'environ 30 %, et les défaillances du système éducatif marocain sont régulièrement pointées du doigt.

Avec AFP