
Le général Ahmed Gaïd Salah a interdit mi-juin le drapeau berbère dans les défilés. Une culture qui fait pourtant partie intégrante de l’identité algérienne, explique Armelle Charrier, chroniqueuse internationale à France 24.
L’homme fort du pouvoir algérien, le général Ahmed Gaïd Salah, a fait savoir mi-juin qu'aucun autre drapeau que l'emblème national ne serait désormais toléré dans les défilés de contestation, ciblant sans le citer le drapeau amazigh (berbère), brandi par de nombreux manifestants. "C’est une manière de pointer le fait que le drapeau berbère serait anti-algérien . O r le drapeau berbère existe bien, ce qui est rappelé dans les manifestations où il est régulièrement brandi : la population qui parle non pas l’arabe mais le berbère représente quand même un quart des Algériens", analyse Armelle Charrier, chroniqueuse internationale à France 24.
Les revendications identitaires de cette minorité linguistique et culturelle ont longtemps été ignorées voire réprimées par les autorités et sont une question très sensible en Algérie.
"Il a fallu attendre 2002 pour que le berbère devienne une langue officielle en Algérie. Il a fallu attendre un massacre sanglant en Kabylie où vivent principalement les personnes parlant le berbère. Mais cette culture-là a toujours été présente, elle fait partie des structures de l’Algérie", explique notre journaliste.
Robes kabyles et chèches touareg
Des centaines d'étudiants et enseignants ont à nouveau défilé mardi 25 juin à Alger pour un changement de régime en Algérie tout en dénonçant l'interdiction par l'armée du drapeau berbère dans les manifestations du mouvement de contestation.
Pour contourner l'interdiction, nombre d'entre eux ont peint mardi sur leur visage la lettre "Yaz" (Z) de l'alphabet berbère (le tifinagh) qui figure au centre du drapeau amazigh.
Des étudiantes ont enfilé des robes kabyles aux couleurs vives ou des foutas (étoffe portée par-dessus la robe en Kabylie) brodées et des étudiants portaient des chèches traditionnels touareg. Les Kabyles sont le principal peuple berbérophone d'Algérie.
Une femme brandi le drapeau berbère de son balcon rue Hassiba Ben Bouali, un drapeau que la police ne pourra pas saisir #Alger pic.twitter.com/k3GaXuHHct
Khaled Drareni (@khaleddrareni) 25 juin 2019"Si on oppose population arabe et berbère, si on reprend le vieux laïus Kabylie contre Algérie, c’est aussi, peut-être, un moyen pour le pouvoir de créer des étincelles au sein du mouvement de contestation", analyse Armelle Charrier.
Les étudiants algériens ne l’entendent pas ainsi : "Arabes et Kabyles sont frères, Gaïd Salah est avec les traîtres", ou "Unité nationale, il n'y a pas de régionalisme", ont-ils notamment scandé, descendus dans les rues pour un 18e mardi consécutif.