La République islamique d'Iran semble jouer l'apaisement alors que le ton ne cesse de monter entre Téhéran et Washington. Mercredi, le président Hassan Rohani a assuré que l'Iran ne cherchait "la guerre avec aucun pays", pas même avec les États-Unis.
Hassan Rohani a joué la carte de l'apaisement, mercredi 26 juin, alors que la tension va crescendo entre l’Iran et les États-Unis sur la situation dans le Golfe, théâtre de la plus brûlante des crises internationales du moment, et sur la question nucléaire iranienne.
Lors d’une conversation téléphonique avec son homologue français Emmanuel Macron, le président de la République islamique a assuré que son pays "n'a aucun intérêt à faire croître les tensions dans la région et ne cherche la guerre avec aucun pays, États-Unis y compris", selon des propos rapportés par l'agence officielle Irna. La veille, il avait accusé Washington de "mentir" quand elle dit qu'elle "chercher à négocier".
Hassan Rohani a toutefois répété la déception des Iraniens face à ce que Téhéran estime être l'inaction des Européens sur la question de l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien, conclu en 2015, et fragilisé depuis que le président américain Donald Trump a en sorti unilatéralement son pays en mai 2018.
Soulignant que l'adhésion de son pays à ce pacte "était conditionnée aux promesses européennes visant à assurer les intérêts économiques de l'Iran", écrit Irna, Hassan Rohani a prévenu que son pays serait amené à réduire davantage les engagements auxquels il a souscrit s'il "ne parvient pas à bénéficier" de l'accord.
Ces propos, qui laissent entendre qu'il reste du temps pour inverser le cours des choses, contrastent avec le contenu d'une note rédigée par l'amiral Ali Shamkhani, secrétaire général du Conseil suprême de la sécurité nationale, publiée mardi par l'agence Fars, proche des ultraconservateurs.
Dans ce document, l'officier, écrit qu'il n'y a plus rien à attendre des Européens et que Téhéran appliquera "résolument" la deuxième phase de son "plan de réduction" de ses engagements en matière nucléaire dès le 7 juillet.
Concrètement, l'Iran recommencerait à partir de cette date à enrichir de l'uranium à un degré prohibé par l'accord de Vienne (la limite est fixée par ce texte à 3,67 %) et relancerait son projet de construction d'un réacteur à eau lourde à Arak (centre), mis en veille.
La France a jugé mardi qu'une "violation iranienne" du pacte serait "une grave erreur".
Ultimatum iranien
Par l'accord de Vienne, Téhéran s'est engagée à ne jamais chercher à se doter de l'arme atomique, et à limiter drastiquement son programme nucléaire en échange de la levée partielle des sanctions internationales qui asphyxiaient son économie.
Mais le président américain Donald Trump, qui accuse l'Iran de chercher à se doter de l'arme atomique et de destabiliser le Moyen-Orient, a engagé son pays dans une politique de "pression maximale" sur la République islamique. Alors même que l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a jusqu'ici certifié que l'Iran respectait ses engagements pris à Vienne.
Les sanctions américaines réimposées depuis août 2018 contre l'Iran ont conduit les principaux clients de Téhéran à renoncer officiellement à lui acheter du brut et ont isolé l'Iran du système financier international, privant ainsi le pays des bénéfices qu'il attendait de l'accord de Vienne. En réaction, les Iraniens ont annoncé le 8 mai qu'ils cessaient de se sentir tenu par deux seuils fixés par l'accord de Vienne concernant ses réserves d'uranium enrichi et d'eau lourde.
Mardi, l'Iran a accusé les États-Unis d'avoir "fermé de façon permanente la voie de la diplomatie", au lendemain de l'annonce de nouvelles sanctions américaines visant le sommet du pouvoir.
Ces dernières, d'une portée essentiellement symbolique, visent le guide suprême Ali Khamenei tandis que le chef de la diplomatie Mohammad Javad Zarif, figure incontournable de la politique iranienne de détente voulue par Hassan Rohani, devrait être placé sur la liste des sanctions "cette semaine".
"Les responsables les plus vicieux du gouvernement (américain) accusent et insultent l'Iran. Le peuple iranien ne cèdera pas et ne capitulera devant de telles insultes", a répliqué mercredi le guide suprême, cité sur son site internet.
Ces nouvelles sanctions viennent s'ajouter à une spirale d'accusations et d'incidents, dont des attaques d'origine inconnue contre des pétroliers et la destruction le 20 juin d'un drone américain par l'Iran dans la région stratégique du Golfe.
Les tensions avec l'Iran au menu du G20
C’est dans ce contexte tendu, que se tiendra vendredi et samedi le G20 à Osaka au Japon. Emmanuel Macron a annoncé, lundi, qu'il rencontrerait "en aparté" son homologue américain Donald Trump pour évoquer le dossier iranien.
De son côté, le pays hôte du G20, le Japon, avait tenté une médiation qui a tourné court entre Iran et États-Unis, tandis que l'Union européenne (UE) et la Russie, allié de l’Iran sur le théâtre de guerre syrien, appellent de leur côté toujours au respect de l'accord sur le nucléaire iranien de 2015. Le président russe Vladimir Poutine aura l'occasion d'en discuter à Donald Trump à Osaka, puisqu’une rencontre bilatérale est prévue entre les deux chefs d’État.
Mardi, la Russie a dénoncé les nouvelles sanctions américaines comme "déstabilisatrices" et a dit disposer d'informations selon lesquelles le drone américain abattu se trouvait "dans l'espace aérien iranien", comme l'assure Téhéran. Washington affirme que l'incident a eu lieu dans l'espace aérien international.
Donald Trump a prévenu mardi que toute attaque iranienne contre des intérêts américain ferait l'objet de représailles "écrasantes". Selon Irna, Hassan Rohani a lui confié à Emmanuel Macron que Téhéran répondrait "avec détermination" si les États-Unis veulent pénétrer illégalement dans les eaux territoriales iraniennes".
Avec AFP