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Manuel Valls n'a pas tout perdu à Barcelone

Malgré sa nette défaite aux municipales à Barcelone, Manuel Valls a permis à sa rivale de la gauche radicale, Ada Colau, d'être réélue samedi. Avec les six élus de sa liste, l'ancien Premier ministre français a joué les faiseurs de rois.

Manuel Valls a perdu la course à la mairie de Barcelone, mais pas l'occasion de se faire remarquer. Arrivé à une modeste quatrième place du scrutin municipal du 26 mai, l'ancien Premier ministre français s'est en effet retrouvé au centre de toute l'attention en offrant son soutien sans condition à la maire sortante de gauche Ada Colau, lui permettant, par le jeu des alliances, d'être réélue samedi 15 juin à la tête de la ville catalane. Un coup de pouce aussi décisif qu'improbable pour l'édile, ex-figure de proue du mouvement des Indignés, qui n'a cessé lors de la campagne de qualifier son adversaire politique franco-espagnol de "candidat des élites".

Le soutien de Manuel Valls a en effet permis de barrer la route à Ernest Maragall, homme politique chevronné de l'ERC ("Esquerra Republicana de Catalunya"), parti qui prône l'indépendance de la Catalogne. Ce soutien inattendu a douché tous les espoirs des indépendantistes, qui gouvernent déjà la région et se voyaient faire main basse sur la métropole catalane pour la première fois depuis les années 1930.

L'honneur sauf

Mais Manuel Valls a fait voler ce scénario en éclats. Pour atteindre la majorité absolue de 21 élus et espérer devenir maire, Ada Colau a pu compter sur le soutien des socialistes et des six élus rassemblés autour de l'ancien élu français. "Le plus important était d'éviter d'avoir à Barcelone un maire indépendantiste", a-t-il expliqué samedi dans son discours lors de la séance d'intronisation d'Ada Colau. Et de préciser que "la gauche ne peut accepter aucun engagement en faveur du séparatisme et du nationalisme".

Certes, Manuel Valls a perdu son pari en arrivant quatrième du scrutin municipal "mais ce soutien inattendu l'honore, estime l'historien Christophe Barret, spécialiste de l'Espagne, dans un entretien à France 24. Il a appliqué une discipline républicaine afin de maintenir un parti légaliste au pouvoir, s'affranchissant de la stratégie des partis, c'est une décision qui ne manque pas de panache."

Un manque d'ampleur nationale

Mais que l'on se rassure sur le sort de Manuel Valls : il n'a pas tout perdu. En siégeant au conseil municipal de l'opposition de Barcelone, "il peut tout d'abord continuer à exister sur l'échiquier politique", souligne Christophe Barret. Puis en prenant ses distances avec ses alliés de Ciudadanos (centre droit), parti qui l'a soutenu mais s'est depuis rapproché de l'extrême droite, il a saisi l'occasion de se repositionner à gauche et de faire taire les critiques à ce sujet.

Cette distanciation lui permet également d'occuper un espace laissé vacant par Ciudadanos concernant l'opposition à l'indépendantisme. "Il ne serait pas étonnant de le voir créer un courant anti-indépendantiste au centre gauche", poursuit l'essayiste.

Reste à savoir si le nouveau conseiller municipal va rester fidèle à son engagement politique à Barcelone. Pour l'heure, "son destin politique semble circonscrit à la métropole catalane, croit savoir Christophe Barret. La personnalité politique de Manuel Valls n'a aujourd'hui aucune portée nationale en Espagne. Il lui sera difficile de lancer un mouvement de grande ampleur."

En attendant, sa position au sein du conseil municipal de Barcelone ne s'annonce pas facile. La maire de Barcelone, quoi que dépendante de ses voix pour obtenir la tête de la ville, ne semble pas prête à enterrer la hache de guerre. Lors de son discours d'investiture samedi, l'élue a assuré qu'elle "n'avait pas cherché" les voix de Manuel Valls. Pire, elle a indiqué que "ses voix l'incommod[ai]ent".