
Le Parlement norvégien a donné son feu vert, mercredi, au fonds souverain pour qu'il en finisse avec environ 13 milliards de dollars d'investissement dans les énergies fossiles.
Il a bâti sa fortune sur le pétrole, et prend maintenant ses distances avec les énergies fossiles. Le fonds souverain norvégien fait un grand ménage pour "verdir" ses placements. Il a obtenu l’autorisation du Parlement, mercredi 13 juin, pour se débarrasser de 13 milliards de dollars d’investissements dans le charbon, le pétrole ou encore le gaz.
La principale victime de cet effort de "désinvestissement" du fonds souverain le plus riche du monde (1 000 milliards de dollars d'actifs) sera l’industrie minière. L'institution norvégienne va vendre pour plus de 6 milliards de dollars de participations dans des entreprises qui exploitent des mines de charbon. Des grands noms du secteur, comme le numéro 1 mondial Glencore ou le géant britannique Anglo American Plc, devraient être affectés par cette réallocation de fonds, même si la liste d'investissements qui seront sacrifiés n'est pas encore définitivement fixée. Elle devrait être publiée début 2020.
Exxon et Shell épargnés
Les groupes pétroliers devraient aussi en sentir les effets. Environ 150 producteurs de pétrole vont perdre le soutien financier du fonds norvégien. L'effort de désinvestissement semble, sur le papier, encore plus important que pour le secteur minier, puisqu'il devrait concerner environ 7,5 milliards de dollars, d'après les calculs effectués par l'agence américaine Bloomberg. Mais, en réalité, le plan initial proposé en 2017 a été revu à la baisse par le gouvernement qui a décidé d'épargner les grands groupes pétroliers. Le fonds souverain continuera ainsi à détenir des participations de géants, dont Exxon ou Shell, et sacrifiera les investissements dans sociétés moins importantes, essentiellement celles spécialisées dans l'exploration et la production de pétrole.
Le gouvernement a expliqué que cette clémence envers les grands noms du secteur était dû au fait que ce desinvestissement n'était pas une sanction contre les groupes pétroliers, mais une manière pour le fonds souverain de se prémunir contre la "chute permanente et inévitable" des prix du pétrole en raison de la montée en puissance des énergies renouvelables. Continuer à investir dans Shell ou Exxon ferait sens, à cet égard, puisque ces groupes développent leurs propres projets dans les énergies propres.
Accueil mitigé
Le fonds souverain a aussi reçu, pour la première fois de son histoire, un mandat pour investir 20 milliards de dollars directement dans les énergies renouvelables. Il devrait se concentrer en priorité sur l'éolien et le solaire dans les pays développé, a précisé Siv Jensen, la ministre norvégienne des Finances.
L'ampleur de l'effort de désinvestissement norvégien a été saluée par plusieurs ONG de lutte contre le réchauffement climatique. "Les autres investisseurs ne pourront pas rester indifférents à la décision d'un fonds dont la richesse provient du pétrole de miser sur les énergies propres", a déclaré au quotidien britannique The Guardian Stephanie Pfeifer, directrice de l'Institutional Investors Group on Climate Change, une alliance d'investisseurs qui militent pour que le secteur financier fasse une croix sur les énergies fossiles pour concentrer leurs investissements dans les énergies renouvelables.
Mais la décision d'épargner les grands groupes pétroliers a fait grincer les dents d'autres ONG. "C'est une victoire des lobbys pétroliers sur le bon sens financier. Ce qui aurait pu constituer un désinvestissement de 40 milliards de dollars [l'ensemble des investissements du fonds norvégien dans le secteur de l'énergie] a été ramené à un peu moins de 8 milliards de dollars", a regretté Sony Kapoor, directrice de Re-Define, un cercle de réflexion international spécialisé dans la finance verte.