
Des manifestations monstres se sont déroulées à Urumqi, capitale du Xinjiang, après des attaques à la seringue qui ravivent les tensions ethniques et pour lesquelles 21 personnes auraient été arrêtées, selon l'agence Chine nouvelle.
AFP - La ville d'Urumqi était pratiquement blouclée jeudi soir après des manifestations de dizaines de milliers de personnes à la suite d'attaques à la seringue, moins de deux mois après des troubles meurtriers dans la capitale de la région musulmane du Xinjiang (nord-ouest).
Les autorités chinoises ayant ordonné aux habitants de rester chez eux, les rues de la ville étaient désertes, mis à part des centaines de policiers déployés aux principaux carrefours, a constaté un correspondant de l'AFP.
Toutes les grandes voies d'accès à la ville étaient bloquées et le déploiement policier était particulièrement dense dans la partie sud, où habitent surtout des Ouïghours, principale ethnie musulmane locale.
Les manifestations avaient commencé jeudi matin pour protester contre une série d'agressions à la seringue visant des membres de divers groupes ethniques, a rapporté l'agence officielle chinoise, ajoutant que les magasins et les marchés étaient fermés.
Selon Chine nouvelle, des Ouïghours, musulmans turcophones opposés en juillet à des Hans dans des affrontements qui ont fait près de 200 morts, étaient parmi les protestataires qui ont perturbé la circulation jeudi.
"Il y a 10.000 à 20.000 manifestants et de nombreux policiers à chaque carrefour. Plus de cent policiers tous les 400-500 mètres", a déclaré la directrice d'un centre médical, une Han, l'ethnie fortement majoritaire en Chine, qui a requis l'anonymat.
"J'ai entendu qu'il y avait eu une manifestation hier. Aujourd'hui, je l'ai vue; ils scandaient 'Protégez notre patrie !'. La plupart sont des Hans", a ajouté cette responsable.
"J'ai fermé ma boutique. J'ai peur de sortir. Il y a beaucoup de gens dehors en train de manifester", a déclaré dans l'après-midi une commerçante avant de raccrocher brusquement.
"Les Hans ont organisé une espèce de manifestation (...) qui semblait pacifique", a indiqué un médecin. "La police a imposé des contrôles routiers", a poursuivi Halisha, médecin de la communauté ouïghoure, disant ne pas avoir entendu de tirs.
Ni les autorités municipales ni le gouvernement régional n'étaient joignables.
Chine nouvelle a rapporté que 21 personnes, dont l'ethnie n'a pas été précisée, avaient été interpellées après avoir agressé des membres appartenant à neuf groupes ethniques, dont des Hans et des Ouïghours. Quatre d'entre elles seront poursuivies pour actes criminels.
Personne n'a été contaminé ou empoisonné par ces attaques à la seringue, affirme Chine nouvelle qui rappelle que l'on ignore la raison pour laquelle les agresseurs ont utilisé des seringues et ce que celles-ci contenaient.
La chaîne de télévision officielle Bingtuan, dont le siège est au Xinjiang, a annoncé que "depuis le 20 août" 476 personnes avaient été ainsi agressées.
Urumqi a été secoué début juillet par des violences entre Hans et Ouïghours, qui ont fait au moins 197 morts officiellement, mais "beaucoup plus" selon les opposants ouïghours en exil.
Les violences interethniques avaient éclaté le 5 juillet lorsque que des Ouïghours s'en étaient violemment pris à des Hans. Les jours suivants, des Hans armés de bâtons et de pelles avaient déferlé dans les rues pour se venger, en dépit d'un imposant dispositif policier.
"Les Hans sont toujours en colère du fait qu'on n'arrive pas à les protéger", a expliqué jeudi un Han d'Urumqi, Chen Xiping.
Une Han a indiqué que les deux derniers jours avaient été particulièrement tendus dans cette agglomération de près de deux millions d'habitants.
Pour sa part, la dissidence ouïghoure en exil a fait état de blessés.
"Nous avons appris que plus de dix Ouïghours avaient été blessés", a déclaré à l'AFP le porte-parole du Congrès ouïghour mondial (COM), Dilat Raxit, dont le siège est en Allemagne.
La Chine a accusé le Congrès d'avoir fomenté les troubles de juillet.