
Le groupe algérien Cevital a réagi dans un communiqué, mercredi, à l'incarcération de son patron. Il se dit "étonné" et nie les accusations portées contre Issad Rebrab.
Dans un communiqué du mercredi 24 avril, le groupe Cevital a fait part de son "étonnement" après le placement en détention provisoire la veille de son PDG, Issad Rebrab. La première entreprise privée d'Algérie a, par ailleurs, nié les accusations de fausses déclarations douanières pesant sur lui.
"Nous exprimons notre étonnement face à cette mesure inattendue", indique le groupe dans son communiqué, qui souligne que les accusations visant Issad Rebrab ne concernent "ni une affaire de corruption ni de détournement ni de dilapidation des deniers publics".
L'homme de 74 ans est visé par une plainte des Douanes algériennes, datant de 2018 et portant "sur des allégations de fausses déclarations, de surfacturation et d'importation de matériel usagé" de la part d'une filiale du groupe, EvCon Industry, explique Cevital. "Cette plainte a été déposée sur la base d'une seule et unique expertise, effectuée à la demande de la Direction des Douanes", poursuit le groupe.
Craintes et doutes auprès de ses salariés en France
Les équipements mis en cause, "de dernière technologie", "fabriqués exclusivement et sur mesure pour un projet inédit de production d'eau-ultra-pure et de traitement des eaux (...) sont bel et bien neufs et la valeur déclarée correspond à leur valeur réelle", assure le groupe qui ajoute avoir demandé à la justice une contre-expertise, requête "toujours en cours de traitement".
Propriétaire en Algérie du grand quotidien francophone Liberté, Cevital a notamment racheté en France le groupe électroménager Brandt (marques Brandt, De Dietrich, Sauter et Vedette) et le fabricant de portes et fenêtres Oxxo, basé en Saône-et-Loire. Le groupe a également un important projet d'usine de traitement de l'eau dans les Ardennes (nord-est).
"Les salariés sont inquiets" a confié mercredi une source syndicale du groupe Brandt, qui compte un millier d'emplois en France et deux usines à Orléans et Vendôme. "Cevital est notre actionnaire à 100 %, quand on a besoin d'investissement c'est par lui ou ses filiales. Si on nous coupe les vivres, on est mort", a ajouté ce syndicaliste.
Même inquiétude dans les Ardennes, où Cevital devait prochainement concrétiser une levée de fonds de 175 millions d'euros pour construire une usine d'équipements de traitement de l'eau, laissant entrevoir de 250 à 300 créations d'emplois, voire jusqu'à 1 000 à moyen terme.
"Est-ce que les choses vont pouvoir continuer d'avancer en l'absence du décideur, au rythme qu'on connaissait jusqu'ici ? Le doute s'instaure actuellement", a réagi Géraud Spire, le président de la Chambre de commerce et d'industrie des Ardennes, tout en disant vouloir pour l'heure "garder espoir".
Le milliardaire était en conflit ouvert avec les autorités
En Italie, Cevital avait aussi racheté, en 2015, les aciéries de Piombino (ex-Lucchini) avant d'être contraint par le gouvernement italien, qui l'accusait de n'avoir pas honoré ses engagements, de les céder en 2018 à l'Indien JSW Steel.
Issad Rebrab a fondé en 1998 le conglomérat Cevital, qui revendique 18 000 salariés sur trois continents, dans l'agroalimentaire, le BTP, la sidérurgie, la distribution, l'électronique ou encore l'électroménager. Le magazine Forbes estime sa fortune à 3,8 milliards de dollars, la 1ère d'Algérie et la 6e d'Afrique.
Depuis la démission du président Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril, sous la pression d'un important mouvement de contestation populaire, la justice a ouvert des enquêtes contre plusieurs hommes d'affaires liés à l'ancien clan présidentiel.
Mais si ses activités ont prospéré sous la présidence Bouteflika (1999-2019), M. Rebrab entretenait lui des relations tendues avec le clan présidentiel et était en conflit ouvert depuis 2015 avec les autorités, les accusant de bloquer ses investissements en Algérie.
Avec AFP