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Crise politique algérienne : "Bouteflika bouté par Gaïd Salah"

Dans la presse, ce mercredi 27 mars, les réactions des journaux algériens et français à l’appel du chef d’état-major de l’armée algérienne, qui demande à ce que le président Abdelaziz Bouteflika soit déclaré inapte à occuper ses fonctions.

À la une de la presse algérienne, les réactions à l’appel, mardi, du chef d’état-major de l’armée, qui demande à ce que le président Abdelaziz Bouteflika soit déclaré "inapte" à occuper ses fonctions.

Jusque-là fidèle au chef de l’État, le général Ahmed Gaïd Salah demande désormais l’application de l’article   102 de la Constitution, qui prévoit de transmettre le pouvoir au président du Sénat lorsque le président " se trouve dans l’impossibilité totale d’exercer ses fonctions". "Une réponse forte et juste" à la crise politique, d’après El Moujahid . "Les aspirations profondes de la société et notamment de la jeunesse vont connaître une traduction en actes", promet le quotidien officiel. Également proche du pouvoir, Le Temps annonce que "l’armée a tranché", et parle d’un "rebondissement", d’un "coup de théâtre". Le journal souligne les déclarations du général Salah sur "l’attachement de l’Armée Nationale Populaire à défendre la souveraineté nationale et à protéger le peuple contre tout risque ou danger".

L’opposition, elle, accueille ces déclarations avec méfiance. "L’armée s’implique dans la crise", note El Watan , où le dessin de Hic montre le chef d’état-major jouant au golf, prêt à envoyer la couronne d’Abdelaziz Bouteflika dans le trou numéro   102 de la Constitution. À la une de Liberté-Algérie , Ahmed Gaïd Salah consulte sa montre, aux côtés du président endormi – il est temps, visiblement, de siffler la fin du match. Mais le patron de l’armée ne convainc pas le quotidien, qui dénonce "la solution frelatée" qu’il a proposée. Pas convaincu non plus, Al Khabar prévient que "le mouvement populaire dépasse l’article   102". Le journal arabophone voit dans la proposition du général Salah une simple tentative pour "maintenir le régime", et "gagner du temps" face à la contestation.

Certains opposants dénoncent un "piège", une "manœuvre machiavélique". Selon eux, "l’option article   102, loin de constituer la solution ni même un début de solution, vise[rait] à emprisonner l’idéal populaire dans une procédure dont l’unique objet [serait] de permettre au système de se régénérer", et il s’agirait en réalité de "sacrifier Bouteflika pour sauver tout le reste" – accusation formulée notamment par Djamel Zenati, un ancien responsable du Front des forces socialistes, cité par TSA . Algériepart voit dans l’appel de Ahmed Gaïd Salah "une tentative de coup de force contre la révolution démocratique du 22   février". "Dépassés par l’ampleur de la révolte populaire, les chefs militaires, en sacrifiant Bouteflika, espèrent contenir un mouvement d’une ampleur sans précédent pour en réduire la portée historique", écrit le site.

Les dessinateurs de presse algériens sont aux premières loges. "Gaïd lâche Bouteflika   !", annonce Saad Benkhelif, qui montre le général envoyant le président dans un précipice, grâce à l’article   102. Mais ce que demande le peuple algérien, ce n’est pas seulement son départ, d’après Dilem, pour Liberté-Algérie . "Le peuple demande l’application de l’article   1 de la Constitution", répliquent les Algériens au général Salah   : "L'article   1 dit que l’Algérie est une république, et ce n’est pas à toi de décider". "Gaïd Salah appelle à l’application de l’article   102", "et le peuple appelle à l’application de l’article   2019   : système dégage", répond Aïnouche – dont on a trouvé le dessin sur Twitter .

En France, on suit évidemment de très près ce qui se passe en Algérie. "L’armée lâche Bouteflika", "l’arbitre a sifflé", annonce Le Figaro – en prévenant que "l’opacité du pouvoir algérien incite à la prudence". D’après le journal, "tout indique que ce 'putsch constitutionnel' a été bien préparé, négocié". Le Figaro n’écarte pas "un scénario 'à l’égyptienne', où [l’armée] récupérerait toute la mise", tout en évoquant "un saut dans l’inconnu"   : "les clans qui forment 'l’État profond', celui qui détient le vrai pouvoir­, réussiront­-ils à s’entendre sur un nom   ? Arriveront­-ils à confisquer le changement   ? La rue, sans nul doute, restera sur le qui­-vive", prédit le journal. "Bouteflika bouté"   : l’armée demande à ce que le président soit déclaré inapte, mais est-ce "pour mieux reprendre la main   ?", s’interroge Libération . Le journal salue une nouvelle fois, ce matin, cette foule algérienne " qui jamais n’a cédé à la facilité de la violence" et "les hommes chargés de faire respecter l’ordre", qui "se sont souvenus qu’ils comptaient un fils, une mère, un frère voire une grand-mère parmi les manifestants". "Le nouveau chapitre" qui s’ouvre se déroulera-t-il "dans les mêmes conditions que les manifestations des semaines passées, de façon enthousiaste et pacifique   ?". "Tout ce que la planète compte de démocrates l’espère", écrit Libé.

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