
Le chef du gouvernement défend mercredi son plan de sortie de crise des Gilets jaunes devant l'Assemblée nationale. L'opposition devrait également pouvoir prendre la parole pour tenter de faire infléchir le Premier ministre.
Le chef du gouvernement sur le grill. Édouard Philippe défend mercredi 5 décembre son plan de sortie de crise devant l'Assemblée nationale, au lendemain d'annonces visant à apaiser les Gilets jaunes et à réduire le risque d'un nouveau week-end de violences.
Le Premier ministre doit faire à 15h00 une déclaration "sur la fiscalité écologique et ses conséquences sur le pouvoir d'achat" devant les députés. Elle sera suivie de 3h30 d'interventions d'orateurs des groupes politiques, la moitié du temps étant dévolu aux oppositions. La procédure est prévue par la Constitution, mais elle est assez rare, et n'a jamais été mise en œuvre sur un sujet brûlant d'actualité.
Enfoncer le clou
Pour le gouvernement, qui répètera l'opération jeudi au Sénat, cette fois sans vote, il s'agit d'enfoncer le clou après l'annonce d'un moratoire de six mois sur la hausse de la taxe carbone, d'un gel des tarifs du gaz et de l'électricité cet hiver, et du renoncement à durcir le contrôle technique automobile avant l'été.
Ces mesures, parmi les plus demandées par les Gilets jaunes, et que presque toute la classe politique, à l'exception des écologistes, préconisait, constituent un recul pour l'exécutif, qui insistait jusqu'à ces derniers jours sur sa détermination à "garder le cap" fiscal de la transition écologique.
Mercredi matin, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux a envisagé que l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) puisse être supprimé s'il est prouvé après évaluation qu'il ne fonctionne pas. Il a précisé sur RTL que l'IFI pourrait faire l'objet d'une évaluation à l'automne 2019.
Il a également réaffirmé mercredi que si l'exécutif "ne trouve pas de solution" à l'issue de la concertation menée jusqu'au 1er mars, il "renoncera" à la hausse des taxes fustigées par les "Gilets jaunes". "On ne fait pas de la politique pour avoir raison. On fait de la politique pour que ça marche. (...) Si on ne trouve pas de solution, on y renoncera", a insisté le porte-parole du gouvernement.
"Mal de vivre"
D’après un conseiller de Matignon, il n'est "pas sûr que l'exécutif ait tout mis sur la table". Quelques cartes, dont une suppression anticipée de la taxe d'habitation, resteraient à jouer. Selon un sondage BVA publié mardi soir, sept Français sur dix considèrent qu'un report de la hausse des prix des carburants prévue au 1er janvier justifierait l'arrêt des manifestations des Gilets jaunes.
Mais partout en France, les appels sur les réseaux sociaux à se mobiliser une nouvelle fois ce samedi sont pour l'heure maintenus. Éric Drouet, l'un des instigateurs du mouvement parmi les plus connus des Gilets jaunes, a appelé à "retourner à Paris" samedi, "près des lieux de pouvoirs, les Champs-Élysées, l'Arc de Triomphe, Concorde".
Dans l'immédiat, les partis d'opposition continuent de plaider un changement de politique. La présidente du groupe PS à l'Assemblée, Valérie Rabault, a ainsi défendu mardi soir la mise en œuvre d'une "social-écologie" contre les inégalités.
La crainte d’une extension de la lutte
Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat, relève que "le souci d'apaisement d'Édouard Philippe tranche avec l'obstination affichée il y a encore quelques jours. Mais après trois semaines de tensions et de violences, l'heure n'est plus à la demi-mesure".
Pour l'Insoumis François Ruffin, les mesures annoncées, "ça ne répond pas au mal de vivre".
Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a invité "les Gilets jaunes raisonnables" à ne pas se rassembler à Paris samedi, et a promis d'accroître la mobilisation des forces de l'ordre en France. Les Républicains demandent le retour de l'état d'urgence, "seule mesure" qui permettrait selon eux de prévenir le retour des violences.
Le gouvernement craint aussi une extension de la colère à d'autres secteurs. Mardi, de nouveaux incidents ont éclaté devant des lycées de la région parisienne, et Marseille reste particulièrement touchée.
Avec AFP et Reuters