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L’écrivain franco-algérien Akli Tadjer face aux lycéens refusant de lire sa prose

L’auteur de "Porteur de cartable", Akli Tadjer, était invité dans une classe de terminale dans le nord de la France, vendredi, pour expliquer son roman, objet d’un rejet de la part d’élèves qui s’assument comme racistes.

"J’ai pu leur dire mes convictions, ma façon de voir le monde". Vendredi 16 novembre, l’écrivain franco-algérien Akli Tadjer a rencontré les élèves de terminale du lycée Pierre Mendès-France, à Péronne, dans la Somme. Invité par le professeur de français, l’auteur a cherché à dialoguer avec les lycéens qui avaient refusé de lire des extraits d’un de ses huit romans, "Porteur de cartable", paru aux éditions Jean-Claude Lattès.

Le dialogue s’annonçait tendu depuis que l’enseignante avait prévenu l’auteur, le 27 septembre dernier, que des élèves de sa classe avaient protesté contre la lecture de son livre, qui narre l'histoire d'une amitié entre le fils d'un combattant du Front de libération nationale (FLN) et un fils de Pieds-Noirs. La raison de ce refus ? "L’auteur n’est pas Français (j’aimerais qu’ils écrivent le français comme [lui]…), l’histoire ne concerne pas la France (ils ne savaient pas que l’Algérie avait été française) et il y a du vocabulaire en arabe… Un élève a refusé de lire pour ne pas prononcer le nom ‘Messaoud’. J’ai dû l’exclure", raconte la professeure dans un message à l'auteur.

Droit de vote l'année prochaine

L’affaire, relayée par Akli Tadjer lui-même, a fait grand bruit sur les réseaux sociaux, et les médias – dont France 24 – étaient nombreux à le suivre, vendredi, dans la Somme. À l'issue de sa rencontre avec les lycéens, l’auteur raconte avoir demandé aux élèves de lever la main s’ils ne s’estimaient pas racistes. La plupart des mains se sont élevées, "autrement dit, ce n’est pas une classe de néo-nazis", se rassure-t-il. Cependant, deux personnes ont bravé les regards, mains abaissées. "Non, je ne suis pas raciste. C’est politique" ont-elles argumenté. "Ça veut tout dire", a commenté l’écrivain face caméras, "sachant qu’ils auront le droit de vote l’année prochaine".

"Je le prends comme de la provocation, ils ont 17 ans", analyse Akli Tadjer. "La provocation passe par des mots racistes aujourd’hui. Je reste optimiste, ils vont grandir, et changer de provocation", espère-t-il, avant de rappeler : "Je me suis déplacé pour expliquer que le racisme n’est pas un rêve, pas un idéal, mais un délit".

Quand l’auteur a demandé aux élèves leurs projets d’avenir, plusieurs ont émis le souhait d’émigrer aux États-Unis. "Vous serez alors dans la peau d’un étranger !", a rétorqué Akli Tadjer. Si le paradoxe a peut-être résonné aux oreilles des lycéens, l’écrivain ne s’avoue pas vainqueur : "Ce n’est pas clos. Ce n’est pas parce que je repars du lycée que c’est fini."