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Présidentielle au Brésil : remplaçant de Lula, Haddad confronté à plusieurs défis

Fernando Haddad remplace Lula comme candidat du Parti des travailleurs à la prochaine élection présidentielle au Brésil. Il entre en campagne avec plusieurs défis à relever d'ici au premier tour, le 7 octobre.

Fernando Haddad a de grandes chances de parvenir au second tour de la présidentielle d'octobre au Brésil après son adoubement par Lula, mais pour remporter l'élection et encore plus gouverner, il devra impérativement se distancer de son mentor.

Président de 2003 à 2010, Lula a attendu la date butoir fixée par les juges pour passer le témoin, après avoir multiplié les recours contre sa disqualification. Mais c'est une onction franche et entière qu'il a donnée à son ancien ministre de l'Éducation, au profil moins fougueux mais aussi plus conciliateur. La voie qui se dresse devant celui qui a aussi été maire de Sao Paulo est toutefois pleine de défis.

 • Une campagne éclair

Pour commencer, il dispose de très peu de temps pour entrer dans une campagne largement entamée par ses concurrents : moins de quatre semaines avant le 1er tour du 7 octobre.

Cet avocat et ancien professeur universitaire de 55 ans, peu connu de l'électorat brésilien, va devoir obtenir le meilleur report possible des voix qui se seraient portées sur Lula. Les derniers sondages plaçaient cette semaine Fernando Haddad à 8 % ou 9 % des intentions de vote alors qu'il n'était pas encore officiellement candidat. Ce qui le place bien loin des près de 40 % dont Lula avait été crédité jusqu'à son invalidation le 1er septembre.

Présidentielle au Brésil : remplaçant de Lula, Haddad confronté à plusieurs défis

Mais il va pouvoir compter sur l'appui de Lula, resté très populaire dans le pays, ainsi que sur la puissante machine électorale du Parti des travailleurs (PT), la grande formation de gauche cofondée par Lula au début des années 80.

Le candidat Haddad disposera par ailleurs du deuxième temps d'antenne le plus long pour la campagne officielle à la télévision, un atout important dans un pays où une grande majorité d'électeurs forment encore leur opinion grâce à ce média. Enfin, le PT possède aussi une importante force de frappe sur les réseaux sociaux, où il est particulièrement actif, ainsi que ses militants.

"Avec tout cela, on voit difficilement comment il n'arriverait pas au deuxième tour", déclare à l'AFP Lincoln Secco, historien de l'Université de Sao Paulo, spécialiste du PT. "C'est seulement une question de temps pour que les électeurs reconnaissent Haddad comme le candidat de Lula".

 • Concurrencé sur sa gauche

L'un des défis de Fernando Haddad sera de prendre des voix au candidat de centre gauche Ciro Gomes, bien implanté dans le nord-est défavorisé, et qui fait un bon début de campagne.

Ex-ministre de Lula lui aussi, Ciro Gomes est désormais en deuxième position dans les derniers sondages, entre 11 % et 13 %, derrière le candidat de l'extrême droite Jair Bolsonaro (entre 24 % et 26 %).

 • Sortir de l’ombre de Lula

L'influence parfois écrasante de Lula sur les décisions du parti et le fait que Fernando Haddad lui ait rendu visite à maintes reprises en prison ces dernières semaines laissent planer le doute : serait-il une simple marionnette de l'ex-président ?

Une question d’autant plus légitime que sur les réseaux sociaux, le PT lui-même a lancé une campagne avec la hashtag #LulaéHaddad (Lula, c'est Haddad).

Vamos lá!
Pra quem ainda não se HaddadPTou o vídeo explica direitinho #HaddadÉLula #LulaÉHaddad - Tudo junto, misturado #LulaHaddadManu13@CUTSAOPAULO @GaleraVermelha @PetralhaZuero @FrenteSP1 pic.twitter.com/uvoRNFG9fM

  PT São Paulo (@ptsaopaulosp) 12 septembre 2018

"Au premier tour, Haddad sera la voix de Lula, pour captiver l'électorat de base du parti, mais au second, [il faudra] qu'il prenne son autonomie pour montrer son profil plus modéré", explique à l'AFP Thomaz Favaro, analyste politique du cabinet de consultants Control Risk.

 • Convaincre l’électorat de centre-droit

Fernando Haddad sera d'autant plus amené à ratisser large dans le cas fort probable où il se retrouverait opposé à Jair Bolsonaro, avec la dure mission de convaincre un électorat de centre-droit souvent viscéralement anti-PT.

Et s'il arrive finalement au pouvoir, il héritera d'un pays à la dette abyssale, à faible croissance et avec près de 13 millions de chômeurs. Un contexte économique peu favorable qui pourrait l'obliger à demander aux Brésiliens de se serrer la ceinture et de mettre un frein à l'ambitieux programme de réformes sociales du PT.

"S'il est élu, il lui faudra trouver un équilibre entre son esprit conciliateur et son parti, dont le programme est plus radical que lors des dernières élections", conclut Thomaz Favaro.

Avec AFP