
Le candidat réformateur à la présidentielle du 12 juin (photo) affirme que des personnes arrêtées lors des manifestations qui ont suivi le scrutin sont mortes après avoir été torturées. Des accusations de sévices reprises par l'ONU.
Mehdi Karoubi, le candidat battu à l'élection présidentielle du 12 juin en Iran, a affirmé jeudi que des personnes arrêtées lors des manifestations post-électorales étaient mortes en prison après des actes de torture.
"Nous observons que, dans un pays islamique, de jeunes gens sont battus à morts simplement pour avoir crié des slogans lors de manifestations", a-t-il dit selon son site Internet Etemademelli.
De son côté, l'ONU a affirmé, jeudi, que les aveux de centaines d'Iraniens incarcérés à la suite des manifestations post-électorales avaient été obtenus sous la torture, selon des détenus et leurs proches.
Des opposants au président réélu Mahmoud Ahmadinejad, comme le candidat réformateur Mir Hossein Moussavi, ont déjà accusé le régime de torture, certains parlant même de viols.
L'Autrichien Manfred Nowak, rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, a dit avoir signalé aux autorités iraniennes plus de 300 cas de maltraitance et de torture recueillis lors d'une enquête de spécialistes des droits de l'Homme à l'ONU.
"Il s'agit principalement d'accusations de passage à tabac, de décharges électriques, de pressions psychologiques et physiques destinées à obtenir des aveux d'opposition au régime", a-t-il dit à Reuters.
Les accusations émanent d'anciens détenus, de proches ou d'avocats de personnes toujours incarcérées, a-t-il dit.
"Elles sont assez cohérentes et plausibles pour que le gouvernement soit forcé de mener une enquête et me faire un rapport. Jusqu'à présent je n'ai reçu aucune réponse", a ajouté le rapporteur spécial de l'ONU.
Manfred Nowak a de nouveau demandé à Téhéran l'autorisation de se rendre en Iran pour enquêter lui-même, sans résultat jusqu'à présent.
Preuves inexploitables
Une grande part des témoignages rapporte des cas de torture dans la prison d'Evin, à Téhéran, ou dans le centre de détention de Kahrizak, dans la banlieue de la capitale.
Les autorités iraniennes ont reconnu que des manifestants avaient été torturés à Kahrizak et ont dit que le directeur du centre avait été emprisonné.
La Française Clotilde Reiss, dont le procès pour espionnage s'est achevé mercredi, a été détenue durant plus d'un mois à la prison d'Evin. La jeune universitaire a admis devant le tribunal avoir pris part à "des manifestations illégales" et transmis un bref rapport sur la situation à Ispahan, où elle enseigne, aux services culturels de l'ambassade de France.
Les témoignages impliquent aussi des commissariats de police ou des responsables de la sécurité en Iran, a dit Manfred Nowak.
S'il est prouvé que des tortures ont été pratiquées afin d'obtenir des preuves, celles-ci seraient inexploitables dans les procès, selon les lois internationales.
L'Iran a incarcéré et jugé des dizaines de personnes pour espionnage et soutien à une "révolution de velours" lors de deux procès à Téhéran, plusieurs semaines après les manifestations ayant suivi la réélection contestée de Mahmoud Ahmadinejad.
"Ces procès semblent être des procès-spectacles", a dit Manfred Nowak.
"J'ai peur que les gens soient reconnus coupables sur la base d'aveux forcés", a-t-il ajouté.
Enfin, les enquêteurs de l'ONU ont rappelé que beaucoup de détenus n'avaient pas le droit de recevoir de visite, d'aide légale ou de traitement médical.
"Nous continuons à recevoir des rapports de décès en détention à propos desquels les familles n'ont que des informations fausses ou contradictoires", ont-ils dit dans un communiqué.