correspondante à Washington – Selfies et conseils pour l'avenir : Emmanuel Macron s'est prêté mercredi soir à un jeu de questions-réponses avec des étudiants de l'université George Washington. Un public qui lui est plutôt favorable. Reportage.
Après deux journées passées à afficher sa bonne relation avec Donald Trump, le président français Emmanuel Macron a changé de ton, mercredi 25 avril à Washington. D'abord devant le Congrès, où il a donné un disours semé de quelques piques contre le dirigeant américain. Ensuite face à des étudiants de l'université George Washington où il a usé d'une certaine liberté de parole.
Le concept, très apprécié par le président centriste, est adapté du "town hall" américain que Barack Obama appréciait tant : Emmanuel Macron, seul sur son podium avec pour toute aide quelques verres d'eau, était cerné d'étudiants qui ont pu lui poser des questions. Il est monté sur ce "ring" en bras de chemise, face à un petit millier de jeunes Américains dans les gradins. Décontracté, il s'est employé à répondre de manière directe, en anglais. S'est-il bien fait comprendre ? Apparemment, oui. Interrogés par France 24, plusieurs étudiants l'ont même trouvé "très éloquent".
#Macron arrive sur scène, façon “townhall” à l’américaine ou agora. “Je suis là pour vous”, dit-il aux étudiants. “Soyez directs” : il (et on) attend les questions. #GWU pic.twitter.com/KBMSnop1e9
Yona Helaoua (@YonaHelaoua) 25 avril 2018Quelques questions de politique étrangère, notamment sur la Syrie, l'attendaient. Il a répété sa volonté de se débarrasser du terrorisme avant de trouver un moyen de stabiliser la région sans pour autant "se substituer à une autre souveraineté". Une réponse qui n'a pas vraiment satisfait Evan, 18 ans : "Il a un peu tourné autour du pot, j'aurais aimé qu'il soit plus spécifique", explique l'étudiant. À l'extérieur du bâtiment universitaire, des protestataires munis de pancartes contre la guerre en Syrie attendaient Macron. "C'est comme en Irak, on commence petit et on finit par coloniser un pays", accusent-ils, demandant à la France et aux États-Unis de "dégager de Syrie".
En terrain conquis
"Rencontreriez-vous le dalaï-lama en tant que chef d'État ?" La question - difficile - d'un étudiant a reçu une réponse diplomatique : une entrevue à Paris "sans condition préalable, juste pour envoyer un signal, [...] serait inutile et contreproductif", a ainsi jugé le président français, proposant plutôt un rôle de médiation. Stéphanie, 18 ans, a apprécié la mesure de sa réplique. "Il a répondu de manière très centriste, sans être radical ni d'un côté ni de l'autre", observe-t-elle. "Il a énoncé des opinions qui sont largement partagées au sein de notre université", ajoute l'étudiante.
George Washington University, forte de 36 000 inscrits, est en effet située en plein centre de la capitale américaine, une ville résolument démocrate. "C'était un exercice intelligent car il vient en terrain conquis", juge Léo, un étudiant français de 20 ans qui a aidé à l'organisation de l'événement. "Cette ville comme cette université sont idéalistes et progressistes", note-t-il. Selon lui, le président français a réussi à "maîtriser les codes et adapter son discours" face à un public jeune.
Certains étudiants, visiblement francophiles, l'ont interrogé sur la situation intérieure, à propos des grèves ou encore de l'antisémitisme en France. La salle l'a particulièrement applaudi quand, questionné sur le lien éventuel entre l'afflux de migrants et les actes anti-juifs, il a répondu par la négative : "l'antisémitisme n'est pas nouveau", a-t-il expliqué. Même raisonnement sur un lien potentiel entre les migrants et les violences sexuelles envers les femmes. "C'était une question ridicule", s'énerve Joann, 19 ans, satisfaite de la réponse d'Emmanuel Macron. Une réponse qui, selon le Français Léo, lui a permis de "rappeler ses différences avec Donald Trump sur la question de l'immigration et du rejet de l'islam". Encore un bon point face à ce public jeune.
"Vive Macron !"
À l'image de Barack Obama, qui s'adressait beaucoup à la jeunesse, le chef de l'État français a lui aussi joué au "coach" pour nouvelles générations : "Vous devez prendre vos propres responsabilités", leur a-t-il intimé. "Si vous êtes frustrés et que vous ne trouvez pas la réponse à cette frustration, n'abandonnez pas, a-t-il ajouté. Considérez simplement que quelque chose cloche dans le système et changeons-le ensemble !" Un message qui a visiblement parlé aux jeunes présents dans la salle, dont certains ont tenu à prendre quelques selfies avec le "French President". Des dizaines d'entre eux ont même attendu deux heures pour l'apercevoir à la sortie de l'université et crier "Vive Macron !".
Truly an #OnlyatGW moment! Epic selfie with the president of France Emmanuel Macron! Thanks for coming to GW! (He took the pic!) pic.twitter.com/F6LCiFKukP
Jack Borowiak (@j_borowiak) 25 avril 2018Bizarrement, les étudiants ne lui ont adressé aucune question sur le climat, un sujet habituellement préoccupant pour la jeunesse américaine. C'est peut-être pour cette raison qu'Emmanuel Macron a choisi de finir cette session par un message au sujet du changement climatique, rappelant que ce problème serait "partie intégrante de la nouvelle génération".
"J'ai vraiment apprécié ce message", affirme Samantha, 21 ans, qui dit avoir grandi dans une zone centrale du Texas où les habitants sont très préoccupés par l'environnement. Selon elle, la relation amicale qu'Emmanuel Macron dit entretenir avec Donald Trump est "une bonne idée" pour parler du climat mais aussi de tous les autres sujets : "Donald Trump est le président des États-Unis, il faut pouvoir traiter avec lui. Peut-être qu'avec un peu de chance, Macron arrivera à l'influencer..." Réponse dans quelques jours.