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Depuis quelque temps, réveils, horloges de fours à micro-ondes et autres appareils accusent dans toute l'Europe un retard de près de six minutes. En cause : un conflit "électrique" dans les Balkans.
Un conflit dans les Balkans est peut-être la cause de votre dernier retard . Entre le Kosovo et le réveille-matin ou l’horloge du four à micro-ondes, il existe un lien qui échappe à la plupart d’entre nous . Mais l’Entso-E, un organisme qui représente les gestionnaires de réseaux électriques dans 25 pays d’Europe, a alerté, lundi 6 mars, sur une baisse de production d’électricité au Kosovo depuis mi-janvier . Cette dernière a entraîné jusqu’à six minutes de retard sur les montres digitales dans les foyers de dizaines de millions d’européens.
A votre avis, ça passe comme excuse au boulot : "J'suis en retard à cause d'un pouième de hertz." ? ||
Pourquoi l'horloge de votre four ou du radio-réveil n'est plus à l'heure? https://t.co/u41RDf0SsB via @flipboard
Ces horloges, branchées sur secteur, restent à l’heure en "écoutant les oscillations de tension du courant électrique", explique Damien Ernst, spécialiste des réseaux électriques à l’Université de Liège, contacté par France 24. La fréquence du courant est de 50 Hz (la norme européenne), ce qui correspond à 50 oscillations par secondes. À chaque fin de cycle, l'heure affichée avance d’une seconde.
Une seconde dure plus longtemps
Mais le Kosovo semble avoir mis à mal la solidarité énergétique européenne, qui consiste à produire une certaine quantité d’électricité. Sa baisse de production a déréglé la fréquence électrique. Depuis mi-janvier, la moyenne se situait à 49,996 Hz, a constaté l’Entso-E. Une situation inédite sur le continent. Cette toute petite différence, accumulée jour après jour, a abouti à un retard de près de six minutes. Les horloges et réveils prennent, en effet, davantage de temps pour enregistrer les 50 oscillations. Une seconde dure donc plus longtemps.
Cette baisse de production pourrait être due à un accident ou un dysfonctionnement d’une centrale électrique kosovare. Mais l ’Entso-E soupçonne un motif géopolitique, lié au différend qui oppose la Serbie au Kosovo, depuis la sécession de la province en 2008.
Contrairement à la Serbie, le Kosovo ne fait pas partie de l’Entso-E, qui a une certaine influence au sein de l’Union européenne, en tant que représentante de grands groupes responsables du bon acheminement de l’électricité sur tout le territoire européen. En baissant sa production, Pristina fait d’une pierre deux coups : montrer à l’Entso-E que sa voix compte et mettre la Serbie dans l’embarras.
Six minutes pour 5 millions d’euros
En effet, Belgrade , lié à un contrat avec l’Entso-E, est tenu de compenser toute baisse de production kosovare. En l’occurrence, le temps, c’est de l’argent pour la Serbie : le Kosovo a accumulé un retard de 113 Gwh d’électricité depuis mi-janvier, "ce qui correspond, au tarif actuel de 50 euros le MWh (mégawattheure), à une ardoise de plus de 5 millions d’euros", souligne Damien Ernst.
Finalement, la fréquence est revenue à 50 Hz, mercredi 7 mars, a confirmé l’Entso-E à France 24 sans préciser, toutefois, qui du Kosovo ou de la Serbie avait cédé. Un retour à la normale en demi-teinte. D’abord, parce que "pour rattraper le retard accumulé par les horloges, il faudra des semaines", souligne une porte-parole de l’Entso-E.
Ensuite, le Kosovo pourrait de nouveau se servir de cette arme pour faire entendre sa voix au niveau européen. Ce qui ferait peser une incertitude sur la norme des 50 Hz qui semblait, jusqu’à présent, acquise. C’est pourquoi l’Entso-E demande à la Commission européenne de faire pression sur la Serbie et le Kosovo afin qu’ils mettent leurs pendules à l’heure. Contactée par France 24, Bruxelles s’est contentée d’affirmer "s’être penchée sur la question".