Initialement prévu à la fin de l'année, le Congrès du Parti communiste cubain a été a nouveau reporté par le président Raul Castro. Il évoque les difficultés du parti à trouver une issue pour sortir de la crise économique.
AFP - Le président cubain Raul Castro a repoussé sine die la tenue d'un important congrès du Parti communiste, divisé sur la marche à suivre pour sortir de l'une des plus graves crises économiques à frapper ces dernières années l'île des Caraïbes, affirment des analystes.
Raul Castro, 78 ans, a estimé que le PC, confronté à des choix ardus en raison de la crise, n'était pas encore prêt pour organiser ce VIe Congrès, constamment repoussé depuis 2002, qui "sera probablement, loi humaine oblige, le dernier avec à sa tête la direction historique de la Révolution" de 1959, a rapporté vendredi la presse cubaine.
Le dernier congrès a eu lieu en 1997 sous la direction de Fidel Castro, bientôt 83 ans, qui reste officiellement le premier secrétaire du seul parti autorisé sur l'île même si, malade, il a cédé les rênes de la présidence de l'Etat à son cadet il y a trois ans.
"Il faut d'abord terminer la préparation du parti, ensuite faire une analyse avec la population dans son ensemble pour pouvoir réaliser le congrès", a déclaré Raul Castro, cité par la presse, mercredi devant le plenum du Comité central du PC.
"Le sujet principal est l'économie, ce que nous avons fait et ce qu'il y a à perfectionner et à éliminer, car nous devons impérativement faire les comptes sur ce dont dispose réellement le pays", a-t-il dit.
"Il a souligné que la fausse unanimité avait des conséquences pernicieuses et qu'il fallait stimuler la saine divergence qui permet en général de trouver les meilleures solutions", a encore rapporté la presse.
Pour l'économiste dissident Oscar Espinosa, si Raul Castro appelle à "des débats sains", "c'est qu'il y a de profondes divergences au sein du parti sur la politique à suivre".
La direction du PC craint des "dérapages" au congrès et de perdre "le contrôle des débats et de certains militants, s'il n'y a pas une meilleure préparation, surtout dans le contexte actuel de crise", ajoute-t-il.
Et une sortie de crise, la plus grave à toucher Cuba depuis la chute de l'URSS en 1991, n'est pas pour demain alors que le ministre de l'Economie Marino Murillo a prévenu mercredi que l'activité économique serait "également difficile" pour "le reste de cette année et les suivantes, notamment en 2010", a rapporté la presse.
L'Etat cubain est à court de devises en raison notamment de la chute l'an dernier de 50% sur les marchés des prix du nickel, principale source de devises pour Cuba, et d'un déficit de la balance commerciale (plus de 10 milliards de dollars) lié notamment à une hausse des importations de denrées alimentaires après les destructions causées en 2008 par trois ouragans.
Selon un diplomate, "la crise est tellement grave" que, dans un discours dimanche, Raul Castro a appelé ses compatriotes à travailler davantage et à cesser de prendre l'embargo américain comme prétexte de toutes leurs difficultés.
"Raul Castro a mis de côté les réformes structurelles promises à son arrivée au pouvoir et tente de reprendre en main l'économie, en installant notamment ses hommes aux postes clefs et en écartant les fortes têtes", a affirmé ce diplomate sous couvert de l'anonymat.
A la tête de l'armée pendant près de 50 ans avant de succéder à son frère aîné, Raul Castro avait réorganisé en mars les ministères liés à l'économie et nommé des militaires à des postes importants.
Il avait alors brutalement limogé les deux jeunes figures de proue du gouvernement, le chef de la diplomatie Felipe Perez Roque et le chef de cabinet Carlos Lage, tombés en disgrâce pour avoir succombé, selon Fidel Castro, "au miel du pouvoir".
"La question, encore taboue à Cuba, de la relève de la direction vieillissante du parti en est une que se pose peut-être Raul Castro pour ce congrès", estime un autre diplomate.