Le groupe international de soutien au Liban, réuni vendredi à Paris, a mis en garde contre toute ingérence dans les affaires du pays, fragilisé par une nouvelle crise géopolitique. Un message destiné à l’Iran et à l’Arabie saoudite.
La communauté internationale a fait bloc, vendredi 8 décembre, pour appuyer les efforts de stabilisation du Liban, fragilisé par une nouvelle crise géopolitique. Elle a notamment adressé une mise en garde à l'Iran et l'Arabie saoudite contre toute ingérence et a rappelé le Hezbollah à la neutralité.
Emmanuel Macron a coprésidé à Paris avec la secrétaire générale adjointe de l'Onu, Amina Mohammed, une réunion du groupe international de soutien au Liban (GISL). Son l'ambition était d'adresser un message fort pour aider à la remise en marche des institutions et de l'économie libanaises, mais aussi freiner les visées déstabilisatrices des puissances régionales.
Face à la lutte d'influence entre l'Arabie saoudite sunnite et l'Iran chiite, le groupe rappelle "la nécessité de protéger le Liban des crises qui déstabilisent le Moyen-Orient [...] dans le plein respect de sa souveraineté et de son intégrité", peut-on lire dans une déclaration conjointe.
Dans un pays au fragile équilibre communautaire, déstabilisé en outre par la présence de quelque 1,4 million de réfugiés syriens, le GISL exhorte "toutes les parties libanaises à mettre en œuvre la politique tangible de dissociation et de non-ingérence dans les conflits extérieurs".
Une invite limpide au Hezbollah, poids lourd de la politique libanaise considéré comme le vecteur d'expansion de l'Iran dans la région, soutien des forces gouvernementales en Syrie et des rebelles houthis au Yémen.
"La distanciation s’impose à tous"
Les forces armées libanaises sont les "seules légitimes" au Liban, stipule le GISL dans un communiqué. "La distanciation s'impose à tous [...] que ce soit l'Arabie saoudite, que ce soit l'Iran", a résumé le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian à l'issue de la réunion. "Ça s'adresse évidemment aussi au Hezbollah, à l'intérieur et à l'extérieur", a-t-il ajouté ensuite aux côtés de son homologue américain Rex Tillerson.
Jean-Yves Le Drian a également annoncé qu'une conférence serait organisée à Bruxelles pour "aider le Liban à prendre en charge les nombreux réfugiés présents sur son sol".
Une conférence de soutien à l'économie libanaise se tiendra aussi dans les premiers mois de 2018 à Paris. Une réunion est également prévue à Rome pour mobiliser des aides en faveur de l'armée libanaise, en formation et en matériel.
Plus tôt dans la journée, le président français Emanuel Macron avait déjà martelé que les acteurs régionaux devaient "respecter le principe de non-ingérence", lors de la conférence de presse d'ouverture de la réunion du GISL, en présence du Premier ministre libanais Saad Hariri.
Composé des États-Unis, de la Russie, de la Chine, du Royaume-Uni et de la France, tous membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, le groupe a annoncé cette réunion après la crise provoquée par la démission surprise le 4 novembre du Premier ministre libanais Saad Hariri, qui a depuis décidé de reprendre son poste.
Principe de "dissociation des conflits régionaux"
"Pour remettre le pays en ordre de marche", deux objectifs ont été rappelés, à commencer par la tenue d'élections législatives prévues en mai 2018. Sur ce point, Saad Hariri s'est engagé à poursuivre la réforme des institutions. Puis, il a aussi promis de reprendre son programme "pour la stabilité et la sécurité interne du Liban afin de répondre aux besoins de nos citoyens tout en faisant face à la crise des déplacés syriens".
"La stabilité du Liban est un petit miracle au vu des conflits de la région", a poursuivi Saad Hariri, qui a souligné les sacrifices de l’armée libanaise pour contenir la menace terroriste. Le pays est "un modèle pour la région et si je puis dire… pour le monde", a-t-il ajouté avant de revenir formellement sur sa décision mardi 5 décembre de ne pas démissionner à la faveur d'un accord de gouvernement avec le Hezbollah chiite, soutenu par Téhéran, sur le principe de "dissociation des conflits régionaux".
Cette position de dissociation et de non-ingérence a été "décrétée en conseil des ministres libanais il y a quelques jours, ce qui veut dire que c’est le Liban officiel qui a pris cette position", a affirmé Ziyad Baroud, ancien ministre de l’Intérieur du Liban, sur l’antenne de France 24. Vendredi, le GISL n’a fait que porter une volonté de Beyrouth, a-t-il expliqué.
Interrogé sur le rôle joué qu'a joué la France dans cet appel au respect de la souveraineté libanaise, Ziyad Baroud a rappelé les bonnes relations entre les deux pays. "Le Liban et le peuple libanais sont reconnaissants [à la France] (…) ; les intérêts en politique priment, mais il y a aussi un minimum d’amitié entre les pays et les peuples et c’est ce que nous avons senti à travers la démarche française", a-t-il souligné.