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Le chef de la secte qui se revendique des "Taliban" d'Afghanistan, Mohamed Yusuf, a été abattu en détention peu après sa capture par l'armée. Les combats entre forces de l'ordre et islamistes auraient fait plus de 600 morts en cinq jours.

Reuters - Le chef de la secte islamiste "Boko Haram", à l'origine de violences qui ont fait plus de 180 morts ces derniers jours au Nigeria, a été tué en détention après avoir été capturé par les forces de sécurité, a annoncé jeudi un porte-parole de la police.

Le prédicateur radical Mohamed Yusuf, dont la secte veut étendre la "charia" (loi islamique) à l'ensemble du pays le plus peuplé d'Afrique, avait été arrêté dans la journée après une chasse à l'homme qui mobilisait des hélicoptères militaires et des policiers armés.

Un journaliste de Reuters avait vu Yusuf après sa capture dans une caserne de Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno, dans le nord du pays. On l'avait transféré ensuite au QG de la police de la ville, où il est mort.

"Il a été tué. Vous pouvez venir voir son corps au quartier général de la police nationale", a déclaré Isa Azare, porte-parole de la police de Maiduguri.

Soldats et policiers avaient auparavant affronté des membres de la secte de Yusuf à Maiduguri après avoir bombardé un complexe lui appartenant. Sur fond de coups de feu, des hélicoptères avaient survolé les lieux tandis que les forces de sécurité traquaient les partisans du prédicateur, maison par maison.

"TALIBAN DU NIGERIA"

Les violences - qui ont aussi déplacé des milliers de personnes - avaient éclaté dimanche après l'arrestation de membres de Boko Haram dans l'Etat de Bauchi, à 400 km environ au sud-ouest de Maiduguri. Ils étaient soupçonnés de projeter l'attaque d'un poste de police.

Armés de machettes, de couteaux, de fusils de fabrication artisanale et de cocktails Molotov, des membres de la secte s'étaient livrés à des violences dans plusieurs Etats du Nord, attaquant des églises, des commissariats de police, des prisons et des édifices publics.

Le président Umaru Yar'Adua, en visite officielle au Brésil, s'est entretenu par téléphone avec les gouverneurs du nord de
son pays. Il a aussi exhorté les chefs coutumiers et religieux à mettre en garde la population, lors des prières du vendredi,
contre le danger que représentent de telles sectes.

"Le président a déclaré que les groupes religieux comme 'Boko Haram' (...) ne devaient être les compagnons d'aucun individu ou groupe musulman authentique", a dit son porte-parole Olusegun Adeniyi.

La fédération musulmane du Nigeria (Jama'atu Nasril Islam) a condamné les violences et exprimé son soutien aux forces de sécurité.

La secte "Boko Haram" - qui signifie "L'éducation occidentale est un péché" en langue haoussa - s'inspire du mouvement taliban d'Afghanistan. Ses adeptes portent de longues barbes et considèrent comme "infidèle" toute personne, musulmane ou chrétienne, qui n'épouse pas leur idéologie rigoriste. La plupart des musulmans du Nigeria lui restent étrangers.

Le colonel Mohamed Yerima, porte-parole de la Défense nationale, a déclaré que l'armée se livrerait vendredi à une "démonstration de force" afin de rassurer les civils en leur faisant sentir qu'ils seraient protégés.

Maiduguri a subi le gros des affrontements. Des habitants de la ville ont dit être encore trop effrayés pour se hasarder au dehors malgré les assurances données par les autorités.

FEMMES ET ENFANTS LIBÉRÉS

"Cette ville ressemble à un champ de bataille", a déclaré à Reuters Muhamed Yakubu, habitant de Maiduguri et journaliste.

Le président Yar'Adua a ordonné aux forces de sécurité de prendre toutes mesures nécessaires pour contenir les membres de la secte, qualifiés de "taliban du Nigeria".

La police de Maiduguri a annoncé que les forces de sécurité avaient tué 90 membres de la secte dans la seule journée de lundi. Huit policiers, trois responsables de prison et deux soldats ont également péri.

Dans l'Etat voisin de Yobe, la police a retrouvé les corps de 33 membres de la secte après une fusillade survenue mercredi près de la ville de Potiskum. Plus de 50 personnes avaient été tuées au début des accrochages dimanche dans l'Etat de Bauchi.

La police a dit avoir libéré mercredi 95 femmes et enfants qui étaient retenus par la secte à Maiduguri. Ses adeptes professent que leurs femmes ne doivent pas être vues par d'autres hommes et que leurs enfants doivent recevoir une enseignement et une éducation exclusivement coraniques.

Pays d'environ 140 millions d'habitants, le Nigeria compte plus de 200 groupes ethniques qui cohabitent en général de façon pacifique, bien que les tensions tribales ou interreligieuses y débouchent parfois sur des affrontements meurtriers.
 

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