
L'Autorité palestinienne reprendra le contrôle de la bande de Gaza d'ici au 1er décembre. Reste la question de la reconnaissance d'Israël, une demande à laquelle le Hamas refuse de répondre pour l'instant.
Après dix ans de dissensions désastreuses autour de la "cause palestinienne" qu’ils avaient juré de défendre, chacun à sa manière, le mouvement laïc Fatah du président Mahmoud Abbas et son rival islamiste Hamas ont annoncé, jeudi 12 octobre au Caire, avoir scellé les termes de leur réconciliation.
Les deux frères ennemis se sont notamment entendus pour fixer au 1er décembre le transfert de pouvoirs dans la bande de Gaza, contrôlée par le Hamas depuis 2007, selon un communiqué des services de renseignements égyptiens qui ont parrainé les négociations. Le Hamas et le Fatah se sont également accordés pour confier le contrôle des postes frontières de la bande côtière, dont celui de Rafah, à la garde présidentielle de Mahmoud Abbas à compter du 1er novembre.
Abbas se rendra à Gaza "dans moins d'un mois"
Mahmoud Abbas a salué cette réconciliation, annoncée la semaine dernière, comme un "accord final pour mettre fin aux divisions". "Je donne pour instruction à la délégation (qui représente le Fatah dans la capitale égyptienne) de le signer immédiatement", a dit le président de l’Autorité palestinienne à l'AFP au téléphone.
Cet évènement intervient après deux jours de discussions menées à huis-clos au Caire, dans le quartier général des renseignements égyptiens. "Nous sommes certains qu’il s’agit d’un bon accord, conclu dans une ambiance positive et une entente totale, et signé dans l’intérêt du peuple palestinien", a indiqué avec satisfaction à France 24 Yahia Rabah, cadre éminent du Fatah.
Le divorce entre les deux camps et leur lutte à couteaux tirés pour le leadership palestinien étaient considérés comme une entrave au règlement du conflit avec Israël, et surtout comme une épreuve supplémentaire endurée par des Gazaouis, déjà éprouvés par un double blocus israélo-égyptien.
Comme un symbole, censé matérialiser le rabibochage, le président palestinien Mahmoud Abbas se rendra à Gaza "dans moins d'un mois", a déclaré à l'AFP Zakaria al-Agha, chef du parti Fatah dans la bande de Gaza. Une première pour le successeur de Yasser Arafat dans ce territoire depuis une décennie.
Faciliter le retour du gouvernement et du Fatah à Gaza
Si l’ensemble des points de l'accord n'a pas encore été dévoilé, des informations ont fuité dans la presse, puisque l’on a appris que le président Abbas devrait lever "très bientôt" les mesures de rétorsions financières prises en 2017 pour forcer le Hamas, déjà soumis à une forte contestation à Gaza, à négocier. Des mesures qui ont durement frappé les conditions de vie des Gazaouis, puisque le paiement des factures d’électricité, fournie par les Israéliens, et le versement des salaires des fonctionnaires, avaient été gelés.
Le premier round de ces pourparlers était censé porter sur les modalités administratives et civiles du rapprochement entre les deux partis. En clair, il s’agissait de faciliter le retour du gouvernement, reconnu par la communauté internationale, et dans son ombre celui du Fatah, chassé de Gaza en 2007 à la suite d’un coup de force du Hamas, classé terroriste Washington et Bruxelles. Les parties devaient notamment régler le sort de dizaines de milliers de fonctionnaires recrutés depuis 2007 par le Hamas.
Autre avancée de l’accord du Caire, 3 000 policiers de l'Autorité palestinienne vont être déployés dans la bande de Gaza, a précisé à l'AFP sous couvert de l'anonymat un haut responsable impliqué dans les tractations.
Il s’agit d’une décision capitale puisque la question sécuritaire de la bande côtière est un point de crispations entre les deux rivaux. Le président Abbas a récemment prévenu qu'il n'accepterait pas l'éventualité que le Hamas reste en charge de la sécurité à Gaza. Le mouvement islamiste avait rétorqué de son côté que la question du démantèlement de son bras armé était exclue des négociations.
"Les deux parties ont laissé de côté la question sensible et centrale de l’armement du Hamas, que le président Abbas, à l’instar du gouvernement israélien, veut démanteler, et qui pourrait peut-être faire échouer cette tentative de réconciliation", explique Marie Semelin, correspondante de France 24 en Israël.
Les deux frères ennemis se sont données deux mois pour régler tous leurs différends, alors qu'une nouvelle réunion est prévue au Caire le 21 novembre.
Des réactions internationales prudentes
Reste l'épineuse question de la reconnaissance d'Israël. Si le quartette pour le Proche-Orient a salué le retour annoncé de l'Autorité palestienne à Gaza, se pose désormais la question de la place qui sera faite au Hamas, qui refuse d'en reconnaître l'existence. Un préalable pour les États-Unis mais aussi pour le Premier ministre israélien. Benjamin Netanyahou a prévenu que son pays n'accepterait de traiter avec un gouvernement parlant au nom de toutes les factions palestiniennes que si le Hamas démantèle son bras armé, rompt avec l'Iran et reconnaît Israël. Des conditions a priori impossibles à satisfaire pour le Hamas.