![Comment "Kingsman : Le Cercle d'or" est devenu le premier film à obtenir les droits d’utiliser une chanson de Prince en B.O. Comment "Kingsman : Le Cercle d'or" est devenu le premier film à obtenir les droits d’utiliser une chanson de Prince en B.O.](/data/posts/2022/07/22/1658514356_Comment-Kingsman-Le-Cercle-d-or-est-devenu-le-premier-film-a-obtenir-les-droits-d-utiliser-une-chans.jpg)
Prince refusait la diffusion de ses chansons par des tierces personnes ou plateformes. Mais depuis sa mort, la bride se détend. Matthew Vaughn devient ainsi le premier réalisateur à avoir le droit d’utiliser un de ses titres pour la B.O. de "Kingsman".
Il y a dix ans, Prince et sa maison de disque s’étaient lancés dans une bataille judiciaire contre une mère de Pennsylvanie qui avait osé poster sur YouTube une vidéo de son bébé gigotant sur "Let’s Go Crazy" – un exemple parmi tant d’autres de la conception drastique qu’avait le chanteur de ses droits d’auteur. Aujourd’hui, le même titre se retrouve en ouverture du film "Kingsman : Le Cercle d’or" pour accompagner une scène de combat du héros Eggsy, incarné par Taron Egerton, contre un vilain méchant. Faisant ainsi de Matthew Vaughn le premier réalisateur à obtenir les droits de diffuser une chanson de Prince dans la bande-originale d’un film qui n’a rien à voir avec Prince.
Bien sûr, il y avait eu le mythique "Purple Rain" d’Albert Magnoli en 1984 dans lequel Prince jouait The Kid et pour lequel il avait composé une petite dizaine de titres parmi lesquels "Purple Rain" et "Let’s Go Crazy". L’année suivante, le long-métrage obtenait d’ailleurs l’Oscar de la meilleure musique de film. Ou encore "Under The Cherry" et "Graffiti Bridge", deux films qu’il a lui-même réalisé et dont il a forcément composé la bande-originale. Mais jamais Prince n’a daigné céder à un réalisateur X ou Y le droit d’utiliser l’un de ses tubes sans participer au projet.
Des inédits pour "Batman" ou "Happy Feet"
À la fin des années 1980, alors que Tim Burton tournait "Batman", il avait demandé à Prince les droits de deux de ses chansons pour rythmer les aventures du super-héros. Le chanteur refusa de céder son copyright sur des titres déjà connus, mais préféra composer un album tout entier pour accompagner le film – c’est ainsi que naîtra le single "Batdance". En 1996 encore, la B.O. du film "Girl 6" de Spike Lee correspondait à un opus complet du même nom, qui regroupait surtout des anciens et quelques rares inédits de la star de la pop. Même scénario toujours pour "Happy Feet" en 2006 : le réalisateur George Miller espérait obtenir l’autorisation de faire chanter à Hugh Jackman et Nicole Kidman une cover de "Kiss" mais Prince décida plutôt d’écrire une nouvelle chanson, "The Song of the Heart", juste pour le film d’animation.
C’est bien simple, les projets de cinéma pour lesquels Prince a bien voulu jouer les compositeurs se comptent sur les doigts d’une main. Et impossible par contre de recenser les centaines voire les milliers de réalisateurs qui se sont pris un refus de la part du chanteur et de sa maison de disques. Mais depuis la mort de Prince, la donne a changé et Matthew Vaughn en est le premier heureux bénéficiaire.
Matthew Vaughn tente sa chance
Interrogé par Mashable FR lors d’une rencontre à Paris, le réalisateur de "Kingsman : Le Cercle d’or" nous a confirmé qu’il s’agissait bien de la toute première fois qu’un metteur en scène obtient les droits d’utiliser une chanson de Prince en guise de soundtrack. Pourtant à l’écriture, Matthew Vaughn n’avait pas prévu de se servir de ce titre : "À l’origine, toute cette scène avait été tournée pour être accompagnée de dix extraits de chansons, représentatifs des très mauvais goûts musicaux d’Eggsy. Et puis on a vu que 'Deadpool' avait fait la même chose en changeant rapidement de musique lors d’une scène de combat dans une voiture, alors on ne pouvait plus faire ça."
"Les négociations ont été très dures"
Alors qu’il travaille précisément sur le montage du film au printemps 2016, Prince meurt brutalement. En "grand fan attristé", Matthew Vaughn se met à écouter sa musique en boucle et réalise que la chanson "Let’s Go Crazy" "colle parfaitement" à cette fameuse scène d’ouverture : "Il y a trois parties dans la chanson et je voyais déjà où je pouvais couper dans la séquence pour que ça matche". Sans trop y croire, le réalisateur londonien de 46 ans contacte Warner Bros. Records. Il raconte : "Je leur ai dit : 'Je sais que Prince ne donnait aucun droit sur ses chansons, mais qu’est-ce qu’il va se passer maintenant ?' Ils ont vu la scène et ils m’ont dit : 'Vous savez quoi ? Si on commence à donner des autorisations d’utilisation pour sa musique, autant que ça démarre avec ce film, il serait fier de voir ça'". Si Matthew Vaughn concède tout de même qu’il aura fallu "de très dures négociations" pour boucler l’accord, on n’en saura pas plus sur les conditions financières de ce deal.
La mort de Prince change la donne
Matthew Vaughn pourrait bien être le premier d’une longue série de réalisateurs autorisés à diffuser des chansons de Prince. Et il n’y a pas qu’avec Hollywood que les relations se détendent. Depuis l’été 2017, des extraits de concerts et des clips de Prince ont été postés sur une chaîne YouTube officielle de l’artiste alors qu’il avait pourtant toujours refusé cela de son vivant. Prince avait une obsession pour le contrôle de son œuvre et se battait pour que ni ses titres ni ses performances n’atterrissent sur aucune plateforme, de YouTube à Spotify en passant par eBay, (feu) Vine ou encore Facebook. Depuis l’avènement du streaming (audio ou vidéo, gratuit ou payant), Prince avait régulièrement exigé le retrait de contenus postés sans son accord sur Internet, n’hésitant pas à réclamer des sommes astronomiques à ses fans qui avaient osé partager des vidéos de ses concerts par exemple.
Quelques semaines avant sa mort, le chanteur américain avait encore posté une salve de tweets à l’encontre de YouTube qu’il accusait de "ne pas payer des droits d’auteur équitables". Mais il n’aura pas fallu attendre longtemps après les funérailles de Prince, parti sans laisser de testament, pour que Warner Bros. Records fasse réapparaître son catalogue musical sur YouTube, Napster, Spotify ou Apple Music. Et maintenant aussi à Hollywood– pour le meilleur, et peut-être pour le pire. S’il faut avouer que la scène d’action de "Kingsman : Le Cercle d’or" rythmée par "Let’s Go Crazy" fait son petit effet, on rigolera moins quand "Purple Rain" deviendra le générique de la série "Violetta".
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