La crainte d'un enlisement de la situation à Al-Hoceïma, au cœur d'un mouvement de contestation dans le Rif, se fait sentir au Maroc, après des peines allant jusqu'à 20 ans de prison ferme prononcées contre des activistes.
La tension reste vive. Au Maroc, le spectre d’un enlisement de la crise à Al-Hoceïma, épicentre d'un mouvement de contestation politique et social dans le Rif (nord), a ressurgi, jeudi 31 août, après la prononciation de peines allant jusqu'à 20 ans de prison ferme contre des activistes.
Neuf activistes du "Hirak", nom donné localement à ce mouvement populaire né en octobre dernier, ont été condamnés à des peines allant d'un an à 20 ans de prison ferme, mardi 29 août, tandis que le procès de 23 autres militants a été reporté par la justice marocaine.
"Procès inéquitable"
Certains ont été jugés coupables d'avoir incendié fin mars un bâtiment de la police dans la localité voisine d'Imzouren, autre haut-lieu de la contestation dans le Rif, région enclavée et historiquement frondeuse du nord du royaume chérifien.
Interrogé par l'AFP, Abdessadek el-Bouchtaoui, avocat et membre du Comité de défense des détenus d'Al-Hoceïma, a dénoncé des "peines sévères", "signe d'un procès inéquitable". Il a aussi fait état d'un "sentiment de colère" chez les habitants. Les familles des détenus ont annoncé qu'elles ne fêteraient pas l'Aïd al-Adha, fête musulmane célébrée vendredi au Maroc, pour protester contre l'incarcération de leurs proches.
Un dossier qui "se complique davantage"
De son côté, la presse locale s'est étonnée, jeudi, du verdict, en particulier de la peine la plus sévère prononcée contre un activiste de 18 ans. "Le dossier du Hirak du Rif se complique davantage", estimait le quotidien Al-Massae, alors que Al-Ahdath Al-Maghribia faisait état d'un "bouillonnement" à Al-Hoceïma. "La crise dans le Rif se poursuit, 360 jeunes ont été arrêtés et sont menacés de condamnation à de lourdes peines", écrivait le quotidien Akhbar Al-Yaoum dans un éditorial.
Le quotidien Assabah a lui pointé du doigt "la violence de certains manifestants", faisant état de "298 policiers blessés" depuis le début de la contestation.
Interrogé par l'AFP, le porte-parole du gouvernement Mustapha El Khalfi a déclaré que "le gouvernement marocain a accéléré depuis un moment le programme de développement dédié à Al-Hoceïma". Il a toutefois refusé de commenter les dernières condamnations.
Après un mois de relatif apaisement, la situation s'était de nouveau tendue début août à Al-Hoceïma, où les appels à manifester se sont multipliés après la mort d'un manifestant.