Auteur du coup d'État du 6 août 2008 contre le premier président mauritanien démocratiquement élu, le général Mohamed Ould Abdel Aziz remporte l'élection présidentielle du 18 juillet dès le premier tour. L'opposition parle de "mascarade".
Un seul tour de scrutin lui aura suffi. Dimanche, le général Mohamed Ould Abdel Aziz a été déclaré vainqueur de l'élection présidentielle mauritanienne du 18 juillet, avec 52,58 % des voix. Mais l'auteur du coup d'État qui a renversé l'an dernier le premier président démocratiquement élu de Mauritanie fait encore mieux, puisqu'il laisse loin derrière lui ses principaux adversaires.
De fait, le président de l'Assemblée nationale et candidat du front anti-putsch, Messaoud Ould Boulkheir, a récolté 16,29 % des suffrages, tandis que le chef du principal parti de l'opposition, le Rassemblement des forces démocratiques (RFD), Ahmed Ould Daddah, n'a recueilli que 13,66 % des suffrages. Ces résultats doivent encore être confirmés par la Cour constitutionnelle.
L’opposition fustige des fraudes
Interrogé dimanche soir sur FRANCE 24, le président nouvellement élu a rejeté les accusations de fraudes émises par l’opposition aussitôt après la publication des résultats. "Les gens qui me soutiennent n’ont ni fraudé, ni triché, ni rien falsifié […]. L'élection s'est passée de manière transparente", a-t-il affirmé.
Dimanche, les principaux candidats de l'opposition ont accusé le général Ould Abdel Aziz de fraude massive, et notamment de "manipulation du fichier électoral", de "corruption généralisée" et d'utilisation de faux documents électoraux", sans cependant apporter de preuves à ces allégations.
"En premier lieu, nous rejetons ces résultats fabriqués à l'avance. Nous demandons par ailleurs à la communauté internationale de mettre en place une commission d'enquête pour faire la lumière sur le processus électoral", ont-il écrit dans une déclaration commune.
Le ministre de l’intérieur, Mohamed Ould Rzeisim, invoque de son côté le fait qu'aucune plainte officielle n'a été déposée.
Pas d’irrégularité flagrante, selon les observateurs
Quelque 320 observateurs internationaux, notamment de l'Union africaine (UA), de l'Organisation internationale de la francophonie et de la Ligue arabe, ont été déployés pour suivre cette élection. Mais ni les Nations unies, ni l'Union européenne (UE), qui avait suspendu son aide au pays à la suite du putsch, n'en ont envoyés, mettant en avant, pour l’UE, des questions de "calendrier".
"Les observateurs internationaux n’ont pas relevé d’irrégularités flagrantes dans ce vote, et la commission électorale n’a confirmé qu’une poignée d’irrégularités", rapporte Cyril Vanier, envoyé spécial de FRANCE 24 à Nouakchott.
Député socialiste de l’Indre, Michel Sapin fait partie des observateurs indépendants qui se sont rendus sur place. "La plupart des critiques qui sont faites par l’opposition concernent la campagne elle-même, a-t-il déclaré à FRANCE 24. S’agissant du scrutin lui-même, je n’ai constaté aucune irrégularité flagrante."
Les priorités présidentielles
Ce scrutin présidentiel est censé mettre un terme à la grave crise née du coup d'État militaire qui a renversé le premier président démocratiquement élu du pays, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, le 6 août 2008. Ce dernier ne se représentait pas.
"Je me considère comme président de l'ensemble des Mauritaniens a déclaré le président élu, lors d'une conférence de presse en soirée. Cette victoire n'est pas seulement la mienne, elle est également celle de tout le peuple mauritanien."
Dans une interview accordée à FRANCE 24, le général Mohamed Ould Abdel Aziz a décliné ses priorités : "La lutte pour le développement, qui passe par la lutte contre la gabegie et la corruption, la lutte contre le terrorisme, la drogue, le phénomène de l’immigration clandestine, et la lutte contre le chômage et la pauvreté."
Une participation de 64,58 %
Le candidat islamiste modéré Jemil Ould Mansour, qui se présentait pour la première fois, a, quant à lui, décroché la quatrième place avec 4,76 % des voix, juste devant Ibrahima Sarr (4,59 %), issu de la minorité négro-mauritanienne, qui avait soutenu le putsch.
Le colonel Ely Ould Mohamed Vall, l'ex-chef de la junte au pouvoir entre 2005 et 2007, qui avait rendu le pouvoir aux civils au terme d'une transition souvent saluée comme exemplaire et qui fut un temps présenté comme un challenger sérieux du général Ould Abdel Aziz - son cousin - n’a recueilli que 3,81% des suffrages. Le taux de participation au scrutin s'est élevé à 64,58 % des inscrits.