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Espionnage pour la Chine : un ex-collaborateur de l'extrême droite allemande face aux juges
Le procès d'un espion présumé au profit de la Chine, ex-collaborateur de l'ancien eurodéputé d'extrême droite allemand Maximilian Krah, s'est ouvert mardi à Dresde. Selon le procureur, il encourt jusqu'à dix ans de prison.
L'accusé Jian G., ancien assistant de Maximilian Krah, alors membre du Parlement européen et membre du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne, arrive à son procès pour espionnage devant un tribunal de Dresde, dans l'est de l'Allemagne. © MATTHIAS RIETSCHEL / POOL/AFP

C'est dans la ville de Dresde, dans l'est de l'Allemagne, que s'est ouvert, mardi 5 août, le procès d'un espion présumé au profit de Pékin, ex-collaborateur d'un sulfureux eurodéputé d'extrême droite allemand. Ces derniers mois, les cas d'espionnage se multiplient outre-Rhin.

De septembre 2019, à son arrestation en avril 2024, Jian Guo, de nationalité allemande, était l'un des assistants parlementaires de l'ancien eurodéputé Maximilian Krah, star sur TikTok et connu lui-même pour son penchant pour les autocraties.

Selon le parquet, Jian Guo aurait "utilisé cette fonction pour collecter des informations" concernant "les avis et décisions du Parlement européen". Son interpellation l'an dernier avait fait du bruit. En effet, Maximilian Krah était la tête de liste de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) pour les élections européennes. Il est depuis passé au Bundestag, où il a été élu député en février 2025.

Mardi, le procureur Stephan Morweiser a souligné devant la presse la "gravité particulière" d'une affaire "sans précédent" entre la Chine et l'Allemagne. "Le cas est exemplaire de l'espionnage chinois vis-à-vis des affaires politiques, publiques, économiques et militaires de l'Allemagne et de l'UE", a-t-il insisté à l'audience.

Actuellement âgé de 44 ans, Jian Guo était employé depuis 2002 par un service de renseignement chinois, affirme le parquet. Au Parlement européen, il aurait collecté au profit de Pékin plus de 500 documents, dont certains classés comme particulièrement sensibles.

Il aurait aussi, toujours selon l'accusation, espionné des opposants et dissidents chinois en Allemagne.

Toujours pour Pékin, il aurait également rassemblé des informations sur des responsables politiques de l'AfD, première force d'opposition en Allemagne depuis les législatives de février dernier.

Complice présumée

Selon l'accusation, Jian Guo aurait également livré à Pékin des informations d'ordre militaire grâce notamment à une complice présumée, désignée comme Yaqi X.

Arrêtée fin septembre 2024, cette ressortissante chinoise âgée de 39 ans est également jugée à Dresde pour lui avoir fourni des informations sur les vols, cargaisons et passagers de l'aéroport de Leipzig/Halle, où elle travaillait pour une entreprise de services logistiques.

Selon le ministère public, ces informations concernaient le transport de biens militaires et des personnes "ayant des liens avec une entreprise allemande d'armement", qui serait, d'après le Spiegel, Rheinmetall, fabricant du char de combat Leopard, livré notamment à l'Ukraine.

Les données transmises "étaient susceptibles de révéler des conclusions sur les capacités" de l'armée allemande, le déploiement de son personnel ainsi que sur "les intentions" géopolitiques allemandes, a assuré Stephan Morweiser à l'audience.

Pour ces raisons, Jian Guo encourt selon lui jusqu'à dix ans de prison, et Yaqi X. jusqu'à cinq.

L'avocat de l'accusé principal a nié toute activité d'agent secret et mis en avant le "contexte politique" dans lequel son arrestation s'est produite. "Il ne peut être exclu que certains interlocuteurs (de Jian Guo) appartiennent à des services de renseignement", a-t-il toutefois concédé.

Yaqi X., elle, "a eu des doutes après un certain temps" sur l'activité de son co-accusé qu'elle avait rencontré sur une application avant d'avoir une "une brève relation amoureuse" avec lui, a assuré son avocate.

Maximilian Krah doit témoigner

Survenue juste après l'arrestation de trois autres agents chinois présumés par les autorités allemandes, celle de Jian Guo avait nourri les craintes d'interférences de Pékin dans la politique de l'Union européenne.

La Chine avait protesté contre une "manipulation politique" et une "diffamation malveillante" à son égard.

Selon le tribunal, Maximilian Krah doit comparaître comme témoin le 3 septembre dans le procès de son ex-assistant, prévu pour durer jusqu'au 30 du même mois.

Cet avocat avait été banni des instances dirigeantes de l'AfD après plusieurs dérapages. Il avait notamment fait scandale en estimant qu'un SS n'était "pas automatiquement un criminel".

Maximilian Krah est par ailleurs soupçonné de blanchiment d'argent et de corruption par le parquet de Dresde. Selon le Spiegel, il aurait reçu entre 2019 et 2023 plus de 50 000 euros de fonds venus de Chine, émanant de sociétés proches de son ex-collaborateur.

Avec AFP