Initialement prévu en janvier, le procès de Teodorin Obiang, fils aîné du président de Guinée équatoriale, soupçonné de s'être frauduleusement bâti en France un important patrimoine, s'ouvre lundi devant le tribunal correctionnel de Paris.
Après un report de cinq mois, le procès du vice-président équato-guinéen, Teodorin Obiang, s’ouvre lundi 19 juin à Paris. Fils aîné du président Teodoro Obiang, il est soupçonné de s'être frauduleusement bâti en France un important patrimoine.
Poursuivi pour blanchiment d'abus de biens sociaux, détournement de fonds publics, abus de confiance et corruption, il encourt jusqu'à dix ans d'emprisonnement et une amende qui pourrait atteindre quelque 50 millions d'euros, soit la moitié du patrimoine mobilier et immobilier saisi en France, selon une évaluation de 2016.
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— Transparencia Col (@transparenciaco) 17 juin 2017La justice française le soupçonne d'avoir assouvi ses goûts de luxe en puisant dans les caisses de son petit État pétrolier, où bien des habitants survivent avec moins de deux dollars par jour. Il est le premier dirigeant africain appelé à comparaître dans l'affaire dite des "Biens mal acquis".
Voitures de luxe et malettes de billets
L'enquête, ouverte après des plaintes des associations Sherpa et Transparency International, a mis au jour le patrimoine considérable de Teodorin Obiang : immeuble avenue Foch, dans l'un des quartiers les plus huppés de Paris, estimé à 107 millions d'euros, voitures de luxe et de sport (Porsche, Ferrari, Bentley, Bugatti). Au terme de l'instruction, les juges ont estimé que son patrimoine, évalué à plus d'une centaine de millions d'euros, ne peut avoir été financé par ses seuls revenus officiels, mais est issu "des détournements de fonds publics", de la corruption.
Il sera absent de son procès, précise Me Emmanuel Marsigny, l'un de ses avocats. "Il a une immunité, il est vice-président, il ne sera pas là", a-t-il expliqué à Reuters.
L'avocat a en outre l'intention de demander lundi un nouveau renvoi de ce procès, dans une affaire qui est entrée dans sa dixième année. Les avocats de Teodorin Obiang avaient obtenu le 4 janvier le report du procès au motif qu'ils n'avaient pas eu assez de temps pour préparer la défense de leur client. Le procès, s'il se tient, s'étalera sur trois semaines. Sept audiences sont prévues.
"Paradis fiscaux"
"Nous demandons que la justice française soit impartiale et que justice soit faite. Le processus a commencé, il faut qu'il aille jusqu'au bout", a déclaré dimanche à l'AFP l'opposant Gabriel Nse Obiang, leader du parti d'opposition Citoyens pour l'innovation (CI).
"C'est l'honneur de la France d'être le pays hôte du premier procès des biens mal acquis", souligne l'avocat de Tansparency International, Me William Bourdon.
De son côté, dans un communiqué lu jeudi à la télévision d'État, le gouvernement équato-guinéen a "condamné énergiquement les actes d'immixtion et de manipulation" de la justice française.
"Le tribunal français manque de compétence et de légitimité juridique pour juger Teodorin Nguema Obiang, car les délits pour lesquels on l'accuse faussement ont été commis en Guinée équatoriale, donc seul son peuple peut se plaindre de la légitimité de ses biens", a jugé vendredi le Parlement dans une déclaration officielle.
Pays pétrolier de 1,2 million d'habitants avoisinant le Cameroun et le Gabon, la Guinée équatoriale est dirigée depuis 1979 par Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, réélu avec 93,7 % des suffrages à la présidentielle du 24 avril 2016.
La justice française enquête également sur les patrimoines bâtis en France par les familles de plusieurs autres dirigeants africains, celle de Denis Sassou Nguesso (Congo), du défunt Omar Bongo (Gabon) ou encore du président centrafricain déchu François Bozizé.
Avec AFP et Reuters