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Si le candidat d'En Marche multiplie les ralliements venant de gauche, ceux venant de droite ne sont pas légion. Un déséquilibre dû au contexte très différent dans lequel se trouvent pour l'instant le Parti socialiste et Les Républicains.

Emmanuel Macron rendant visite à Marseille au président LR de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur Christian Estrosi : la poignée de mains entre les deux hommes a marqué l’actualité politique du week-end et les commentaires venant de droite ou de gauche n’ont pas manqué. Si le candidat d'En Marche à l’élection présidentielle a simplement évoqué un "accueil républicain", il y avait bien derrière cette rencontre un calcul politique.

Car Emmanuel Macron en a conscience : après les annonces successives de Bertrand Delanoë, Jean-Yves Le Drian et Manuel Valls, qui voteront tous les trois pour lui au premier tour de la présidentielle, sa candidature est de plus en plus associée par François Fillon et Marine Le Pen à la gauche et au gouvernement sortant. Il y avait donc urgence à s’afficher au côté d’une personnalité de droite pour envoyer des signaux à cette famille politique.

"Ce qu'il faut éviter, c'est que s'installe l'idée qu'on renommera le même gouvernement avec un président différent", explique ainsi un membre de l’équipe d’Emmanuel Macron dans le Journal du Dimanche.

Problème : les ralliements de droite ne sont pas légion. Il y a bien un certain nombre d’anciens ministres chiraquiens qui ont adhéré à En Marche, comme Renaud Dutreil ou Anne-Marie Idrac. Il y a aussi cette cinquantaine de conseillers de droite proches d’Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin qui a fait le même choix, selon le JDD. Mais aucun grand nom ne figure parmi eux et chez les élus LR, seul le sénateur de l’Yonne Jean-Baptiste Lemoyne a jusqu’ici franchi le pas.

"Les temporalités sont tout simplement différentes, veut croire Jean-Paul Delevoye, président de la commission d’investiture d’En Marche pour les législatives, interrogé par France 24. Les clivages au sein de la gauche ont été exprimés et la recomposition est déjà en cours, alors que ce n’est pas encore le cas à droite. On observe toutefois un craquellement au sein de cette famille politique : de plus en plus d’hommes et de femmes à droite se sentent tiraillés et, plus la perspective d’une absence de François Fillon au deuxième tour de la présidentielle se renforcera, plus ils se sentiront libres de leur choix."

La droite pas aussi divisée idéologiquement que la gauche

À entendre cet ancien ministre de la Fonction publique de Jacques Chirac, il ne s’agirait donc que d’une question de temps avant les premières annonces de ralliements importants venant de droite. Un avis que ne partage toutefois pas l’ancien directeur de campagne de Bruno Le Maire, Jérôme Grand d’Esnon, qui a pourtant rejoint En Marche début février.

"Il n’y a pas beaucoup de ralliements à attendre chez les députés de droite, confie-t-il à France 24. Ceux en campagne pour les législatives avec une investiture LR ne vont pas prendre le risque de rejoindre Macron car ils se retrouveraient alors dans leur circonscription avec un nouveau candidat estampillé LR face à eux. Et puis François Fillon n’est pas hors course, il peut encore se qualifier pour le deuxième tour."

L’UDI apparaît sans doute comme l’exemple le plus frappant de cette logique implacable. Alors que ses membres ont beaucoup plus en commun avec Emmanuel Macron qu’avec François Fillon, le parti de centre-droit est resté fidèle au candidat Les Républicains après avoir négocié un accord lui octroyant 96 circonscriptions pour les élections législatives.

Par ailleurs, la droite n’est pas aussi divisée en son sein que la gauche. La candidature de François Fillon a, certes, été vivement contestée en raison de sa mise en examen, mais pas au point de faire exploser le parti. Bruno Le Maire a quitté l’équipe de campagne, Alain Juppé a eu des mots très durs à l’encontre de l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy et de nombreux élus ne font plus activement campagne sur le terrain. Mais, à un peu moins de trois semaines du premier tour, plus personne chez LR ne s’oppose ouvertement à François Fillon. L’objectif commun de faire gagner la droite en mai a repris le dessus.

"Contrairement à la gauche, la droite s’est divisée par le passé sur des ambitions personnelles plutôt que sur des opinons politiques, souligne le député LR des Alpes-Maritimes Jean Leonetti, contacté par France 24. Il y a des sensibilités politiques différentes bien sûr : je représente la droite humaniste quand, par exemple, Éric Ciotti représente la droite forte. Mais nous avons malgré tout la même ossature et le même corpus de pensée avec plus de points qui nous rassemblent que de points qui nous divisent."

La recomposition politique espérée par Emmanuel Macron n’est donc pas encore totalement en marche. S’il est élu président, celle-ci dépendra en réalité davantage des résultats aux élections législatives, qui s’annoncent de plus en plus comme le troisième tour de la présidentielle.