Le soutien du ministre de la Défense à Emmanuel Macron était pressenti depuis plusieurs jours. Un choix qui n'a rien d'étonnant au regard des épisodes de ces derniers mois, mais qui ne plaît guère au camp de Benoît Hamon.
Il s'agit du troisième membre du gouvernement à soutenir Emmanuel Macron pour l'élection présidentielle. Après Barbara Pompili, la secrétaire d'État à la Biodiversité, et Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Jean-Yves Le Drian a annoncé son soutien, jeudi 23 mars, devant des élus du conseil régional de Bretagne. Une décision confirmée dans une interview publiée dans le journal Ouest France vendredi.
Le ministre de la Défense a évoqué, pour justifier sa décision, "le danger pour la France" que représenterait la victoire de Marine Le Pen à la présidentielle, soulignant qu'il ne voulait pas laisser courir quelque "risque" que ce soit pour le pays.
Du point de vue d'Emmanuel Macron, il s’agit sans nul doute de sa plus belle prise : il enrôle là un poids lourd du gouvernement, mais aussi une figure régalienne, très proche, qui plus est, de l'actuel président. De quoi apporter la consistance qui manquait jusqu’à présent à sa candidature. Très populaire, Jean-Yves Le Drian jouit d’un très bon bilan au ministère de la Défense, mais aussi dans son ancrage local. Le président de la région Bretagne avait été réélu en décembre 2015 avec plus de 50 % des voix dans une triangulaire avec des candidats LR et FN.
L'Élysée freine
Cette annonce vient officialiser les rumeurs très persistantes évoquées ces dernières semaines dans les médias français. L’Élysée a, selon Le Point, tout fait pour freiner le ministre de la Défense. François Hollande s’est même fendu de plusieurs SMS pour lui demander d’attendre avant de se positionner. Sauf que Jean-Yves Le Drian, resté loyal au président tout au long du quinquennat, a choisi de s’en affranchir : "Je t'annonce que je vais soutenir Emmanuel Macron. C'est imminent. Ma décision est prise", lui a-t-il rétorqué, d'après l’hebdomadaire, la semaine dernière par SMS.
Officiellement, Jean-Yves Le Drian n’attendait qu’une seule chose : que Macron détaille son programme sur la Défense, qu’il a présenté le 18 mars. Un texte auquel il aurait apposé son empreinte. "Cela fait des semaines qu'il nourrit Macron de fiches sur les affaires de défense", aurait glissé un proche du président de la région Bretagne au Journal du Dimanche.
Désamour avec Hamon
Dans le camp socialiste, personne ne feint la surprise de ce ralliement. Jean-Yves Le Drian, social-libéral, et Benoît Hamon, bien plus à gauche au sein du PS, n'ont jamais été des proches. "Il n'a sans doute pas oublié le parachutage imposé et raté de Hamon aux législatives de 1997 en Bretagne", rappelle dans La Nouvelle République Hubert Coudurier, auteur de "Jean-Yves Le Drian, le glaive du président".
Ce Breton pragmatique avait apporté son soutien à Manuel Valls lors de la primaire de la Belle Alliance populaire. Et lors d’un meeting du candidat socialiste à la présidentielle à Brest, tous les ténors du PS étaient présents… sauf lui.
Le coup bas semble difficile à avaler pour le candidat socialiste. Ses porte-parole accusent le ministre de la Défense, élu député par les électeurs de gauche depuis quarante ans, de ne pas "respecter le vote des électeurs de gauche qui, y compris dans le Morbihan, ont largement désigné Benoît Hamon comme leur candidat pour cette élection présidentielle".
Il reste à savoir ce que fera Jean-Yves Le Drian en cas de victoire d’Emmauel Macron. À 69 ans, celui qui rêvait de finir sa carrière politique en Bretagne pourrait être appelé à rempiler.