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Festival Fespaco : "Wulu", un thriller à Bamako

"Wulu" est un thriller efficace sur le trafic de drogue au Mali. Daouda Coulibaly, le réalisateur franco-malien, a reçu pour ce film le prix Ousmane Sembène, et l'acteur Ibrahima Kouma, celui de meilleur interprète masculin au festival Fespaco.

Ladji est un jeune malien de vingt ans qui nourrit de grandes ambitions mais qui, comme la plupart des jeunes africains, n’a pas de travail. N'ayant pas réussi à obtenir un poste de chauffeur, il décide de rejoindre le monde du crime en convoyant de la cocaïne. Si cette histoire est une fiction, c’est sur la réalité de la vie en Afrique de l’Ouest, et au Mali en particulier, que le réalisateur Daouda Coulibaly a puisé sa matière pour son premier long-métrage.

L’idée du film est née dit-il lors "de la lecture d’un article de presse sur le trafic de drogue en Afrique de l’Ouest. Après un peu d’investigation, j’ai pris conscience de l’ampleur du phénomène. D’instinct, je me suis demandé ce que ce trafic pourrait bien présager." Un coup de maître pour son premier essai. Il emprunte les codes de la fiction occidentale moderne, mais ancrée dans les réalités des pays africains. En ce sens, il rappelle le film du congolais Djo Tunda Wa Munga, "Viva Riva !".

"Wulu" est un thriller efficace et, au-delà de l’ascension d’un jeune dealer dans la ville de Bamako, c’est toute l’histoire récente du Mali qui est racontée. Le trafic de drogue est un véritable tabou dans ce pays. Et pourtant, il est à la convergence de plusieurs faits expliquant la corruption des politiques, des douaniers, des élites et des jihadistes. Ce monde violent, Daouda Coulibaly le traduit à l’écran sans jamais trahir aucune localité africaine, ni aucun habitant. Les décors, souvent naturels, vous plongent dans les villes vivantes et diverses. Les bidonvilles comme les beaux quartiers, les jolies maisons et les hôtels chics, l’idée étant de sortir des clichés souvent accolés aux pays africains, souvent dépeint comme des agrégats de villages.

"Wulu" parle d’une Afrique moderne, urbaine, pauvre, ingénieuse tout en restant ancrée dans ses traditions, car il est tout autant question d’ascension dans le monde de la drogue que d’élévation spirituelle. Le jeune Ladji accomplit toutes ses tâches avec une intelligence et une ardeur qui forcent le respect. Intelligence dont on déplore le gâchis.

Ibrahima Koma, meilleur interprète masculin du Fespaco

l'acteur qui incarne magistralement ce rôle de dealer mutique et charismatique est le franco-malien Ibrahima koma. Sa performance a d’ailleurs été remarquée au Fespaco, où il a décroché le prix du meilleur interprète masculin. Il campe un jeune homme qui, pour obéir à son devoir, va jusqu’au bout de ses promesses, même les plus intenables. Le casting est brillant. Et Coulibaly a un talent rare pour débusquer le talent là où il se trouve.

C'est ainsi que la chanteuse malienne Inna Modja campe un rôle inattendu, celui d'une prostituée désabusée et vénale. Un film qui a séduit le public burkinabè lors du Fespaco.