
Dans une interview mardi sur RFI, le négociateur nigérien chargé de la libération des otages d’Arlit refuse de faire le lien avec l’assassinat de Claude Verlon et Ghislaine Dupont au Mali, qu’il qualifie de "rapt d’opportunité qui a mal tourné".
Dans une interview exclusive accordée à RFI mardi 31 janvier, Mohamed Akotey, le négociateur nigérien impliqué dans la libération des otages d’Arlit au Niger en octobre 2013, refuse de faire le lien entre les négociations pour la libération des otages d'Arlit et l'assassinat des deux reporters français de RFI Ghislaine Dupont et Claude Verlon en 2013 dans le nord du Mali. Mohamed Akotey évoque "un rapt d’opportunité qui a mal tourné".
Une enquête journalistique diffusée la semaine dernière dans l’émission Envoyé Spécial sur France 2, retraçant les coulisses de la libération des otages d’Arlit, évoquait la possibilité d’un lien direct entre les ratés des négociations d'Arlit et l'assassinat des deux journalistes de RFI.
Selon Mohamed Akotey, qui s’exprime pour la première fois dans un média français, c'est justement la presse, qui aurait trop parlé "du montant faramineux de la rançon" versée pour libérer les otages d’Arlit, "que cela a dû donner des idées à quelques-uns. Ils ont trouvé ce qu’ils avaient sous la main et puis cela a mal tourné".
Le négociateur nigérien d’Arlit estime également que l’ordre d’assassinat n'a pas été émis par la direction d’Aqmi. "J’en doute parce que venant de plus haut, les gens auraient dû préparer le coup de manière plus professionnelle, comme ils ont l’habitude de le faire, mais je pense qu’il a pris la décision tout seul, ou en tout cas avec des gens inexpérimentés" affirme-t-il.
La concurrence des négociateurs
Concernant les négociations pour la libération des otages d’Arlit, Mohamed Akotey rappelle qu’il a joué un rôle central. "C’est moi qui suis parti chercher les otages et que je les ai ramenés à Niamey. Avec les services de renseignements du Niger, on a pris l’hélicoptère du Niger et on les a ramenés à Niamey" souligne le négociateur. Il refuse toutefois donner le montant de la somme versée, et de dire si elle a été versée dans sa totalité.
Son témoignage revient également sur la concurrence entre les différents négociateurs envoyés sur le terrain pour tisser des réseaux et libérer les otages. On apprend, comme l’affirmait France 2, que deux négociateurs français se sont succédés, d’abord Jean-Marc Gadoullet, envoyé par la DGSE, puis Pierre-Antoine Lorenzi avec "l’appui" du ministère de la Défense, avant que celui-ci ne soit contraint de se retirer parce que "le directeur général de la DGSE s’est opposé à sa présence dans la mission".
Sans critiquer frontalement le travail des Français, le négociateur nigérien rappelle à plusieurs reprises que les intermédiaires rencontrés par Jean-Marc Gadoullet ne sont pas sa "propriété". D’après RFI, l’ex-négociateur de la DGSE accuse Mohamed Akotey d’avoir récupéré les fruits du travail qu’il avait lui-même initié.
Après la diffusion jeudi du reportage de France 2, France Médias Monde, partie civile dans l’enquête sur les circonstances de la mort de ses deux collaborateurs, a souhaité que la justice se saisisse des nouveaux éléments révélés par Envoyé spécial et mandate ses avocats afin qu’ils demandent au juge d’instruction de poursuivre les investigations.