Depuis l’élection de Donald Trump, les associations qui défendent des valeurs opposées à la nouvelle politique du gouvernement américain ont le vent en poupe. Certaines d'entre elles reçoivent des donations record de dizaines de millions de dollars.
À New York, lors de la journée d’investiture de Donald Trump, le 20 janvier, une autre fête, plus discrète, s’est tenue au premier étage d’un hôtel du East Village. Moyennant 125 dollars l’entrée, les participants de cette soirée de "non-inauguration", vêtus de costumes et de robes de bal, pouvaient siroter des cocktails renommés "bad hombres" et "nasty woman" pour l’occasion, en référence aux propos tenus par Trump durant la campagne électorale, visant les immigrés illégaux et sa concurrente Hillary Clinton.
Au total, 55 000 dollars ont été récoltés lors de la soirée au profit de l’Association nationale pour la promotion des gens de couleur et du Fonds de défense judiciaire (NAACP LDF), du Planning familial américain (Planned Parenthood), de l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) et du Conseil de défense des ressources naturelles (NRDC).
Cette soirée est l’un des nombreux exemples de collectes de fonds organisées dans la ville. Depuis l’élection de Donald Trump en novembre, une "résistance" contre le nouveau président a vu le jour à coups de billet de banque ou de chèque. Cet argent doit servir à défendre les droits civiques, les musulmans ou encore l’environnement, que la nouvelle administration américaine semble peu encline à protéger.
Des "donations enragées"
Des vagues de dons, mais aussi des propositions de bénévolat, ont ainsi été enregistrées par plusieurs ONG, considérées comme un rempart contre les excès de la nouvelle administration. "Les gens veulent aider de toutes les manières possibles. Ils ressentent le besoin de ‘faire quelque chose’ ", explique Phoebe Plagens, porte-parole de NAACP LDF.
Pour exemple, en moins de trois mois, l’ACLU, qui protège les droits des personnes par le biais d'actions judiciaires et de lobbying législatif, a récolté près de 39 millions de dollars, grâce à la générosité de plus de 450 000 donateurs. Un record absolu en une période si courte, explique l’association qui existe depuis près de cent ans et précise que cette somme dépasse les fonds récoltés après les attentats du 11 septembre. Ce mouvement a d’ailleurs pris le nom de "donations enragées".
La NAACP LDF déclare aussi de son côté n’avoir jamais reçu un tel soutien. Les associations NRDC, qui œuvrent pour la défense de l’environnement, et Muslim advocates, qui soutient la communauté musulmane, parlent pour leur part d’une "forte augmentation" ou d’une "réponse incroyable de la part de la population". Aucune de ces trois associations ne donnent de chiffres toutefois.
D’une manière ironique, l’élection à la tête de l’État du milliardaire new-yorkais climatosceptique, anti-avortement et anti-immigration (surtout pour les personnes provenant de pays à majorité musulmane) a donc un "aspect très positif" pour ces associations, comme l’explique Sam Wicks, représentant de la NRDC. "Mais on aurait bien sûr préféré que cela survienne dans des circonstances différentes", ajoute-t-il.
"Cela a dépassé nos attentes"
Forte de son nouveau budget, la NRDC évoque la mise en place de partenariats avec des villes américaines pour "progresser dans les domaines du climat et de l’énergie propre" et parle, plus généralement, d’un travail de lobbying au niveau du gouvernement.
Plusieurs associations restent néanmoins vagues quant à la manière dont ces dons seront utilisés. "Nous allons protéger les dreamers (ces jeunes entrés illégalement avec leurs parents aux États-Unis, souvent tout petits, NDLR), résister à la création d’une force visant à déporter des personnes, nous opposer à tout arrêt de subvention au planning familial", indique le directeur de l’association ACLU dans un blog.
Lundi, Donald Trump a décrété la fin des financements fédéraux aux organisations qui promeuvent l’avortement à travers le monde, dont Planned Parenthood.
De son côté, la NAACP LDF, qui lutte contre les discriminations envers la communauté noire, prévoit d’investir son pactole notamment dans le recrutement d’avocats supplémentaires. Ces derniers grossiront les rangs des 23 spécialistes du barreau déjà en poste.
Les organisateurs de la soirée new-yorkaise de "non-inauguration" ont eux aussi décidé de capitaliser sur leur succès. Ceux qui se décrivent comme des Américains lambda "terrifiés" viennent de créer l’association "The banner yet waves" ("la bannière flotte encore", phrase issue de l’hymne national américain), dans le but d’organiser régulièrement de nouvelles collecte de fonds.