
Des policiers anti-émeutes face à des manifestants hostiles au gouvernement à Belgrade le 15 août 2025 © Marko DJOKOVIC / AFP
Après plusieurs soirées d'affrontements marqués par des dizaines de blessés et d'arrestations, des partisans du président nationaliste Aleksandar Vucic ont à nouveau fait face dans un climat tendu à des manifestants réunis dans la capitale vendredi 15 août.
Des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes ont été ensuite employés envers les manifestants anti-pouvoir, a constaté un journaliste de l'AFP.
Les manifestations sont régulières dans ce pays des Balkans depuis l'effondrement en novembre 2024 d'un auvent en béton à la gare de Novi Sad (nord). La tragédie, qui avait fait 16 morts, a rapidement été imputée à la corruption par les manifestants.
Les manifestations, menées par les étudiants, étaient jusqu'à présent généralement pacifiques. Elles ont lieu à travers le pays et ont rassemblé jusqu'à plusieurs centaines de milliers de personnes.
La situation s'est envenimée cette semaine lorsque des groupes de partisans du pouvoir, souvent masqués et armés de matraques ou d'engins pyrotechniques, s'en sont pris aux protestataires.
Les deux camps s'accusent de souhaiter que la situation dégénère.
"Je ne veux pas vivre dans un pays sous répression policière", a dénoncé auprès de l'AFP Zeljko, un manifestant de 46 ans présent devant des bâtiments gouvernementaux vendredi à Belgrade.
Quelques centaines de mètres plus loin, des dizaines de partisans du pouvoir, en t-shirts noirs, étaient réunis et ciblaient les manifestants avec des lasers verts.
"Ils battent les gens et protègent les criminels, avec des pieds-de-biche. Je suis venu pour dire que nous n'accepterons pas ça", a assuré Zeljko, qui n'a pas donné son nom de famille, à leur sujet.
"Impuissants"

La police a arrêté des dizaines de manifestants ces derniers jours, notamment lors du saccage de locaux du Parti progressiste serbe du président (SNS, nationalistes) à Novi Sad.
Des élus de l'opposition et des militants anticorruption ont accusé les partisans du pouvoir de violences, partageant des images de manifestants lourdement blessés.
Certaines vidéos diffusées en ligne montrent aussi la police frappant des manifestants non armés avec leurs matraques.
Les forces de l'ordre ont rejeté ces accusations, affirmant avoir été attaquées par les protestataires, avec plus de 120 agents blessés ces derniers jours.
"Tous ceux qui ont passé ces derniers jours à répandre des mensonges sur la brutalité de la police devraient s'expliquer sur ces chiffres", a déclaré à la presse le ministre de l'Intérieur Ivica Dacic vendredi.
Le président, qui qualifie régulièrement les protestataires anti-corruption de "terroristes", les a encore mis en cause dans les violences des derniers jours.

"Nous sommes complètement impuissants parce que la police est du côté des criminels", a estimé Nevena, 52 ans, qui manifestait vendredi. "Ils ont pris l'État en otage".
Sous la pression de la rue ces derniers mois, le gouvernement a été remanié, le Premier ministre remplacé et plusieurs anciens ministres ont été arrêtés et inculpés.
Depuis mai, les manifestants réclament des élections anticipées, ce que le président Vucic, réélu en 2022 pour un mandat de cinq ans, refuse, dénonçant un complot étranger visant à renverser le pouvoir en place.
Aleksandar Vucic est un proche partenaire du président russe Vladimir Poutine. Son pays, qui refuse de sanctionner Moscou pour l'invasion de l'Ukraine, est en même temps candidat à l'entrée dans l'Union européenne, un partenaire économique essentiel.
(AFP)