Considéré comme un "petit" candidat à la primaire de la gauche par les médias, François de Rugy, qui se bat pour imposer l'écologie dans la campagne, a réussi lors des deux premiers débats, jeudi 12 et dimanche 15 janvier, à faire parler de lui.
En deux débats, l’écologiste François de Rugy a réussi à imposer son style dans la primaire de la gauche. Calme, clair, nuancé, l’actuel vice-président de l’Assemblée nationale et ancien membre d’Europe Écologie-Les Verts refuse la démagogie, les postures et les caricatures, se permettant même de recadrer certains de ses concurrents sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), le nucléaire ou le 49-3 citoyen.
Si ce positionnement n’est pas garant d’une accession au deuxième tour, il a en tous cas permis au député de la Loire-Atlantique de se faire connaître et de recueillir de nombreux satisfecits sur les réseaux sociaux. Entretien.
France 24 : Sur le nucléaire, le 49-3 citoyen ou le cannabis, vos remarques ont fait mouche à plusieurs reprises et ont souvent été saluées sur Twitter. Ces débats peuvent-ils vous permettre de faire plus que de la figuration dans cette primaire ?
François de Rugy : Je n’ai jamais pensé que j’y allais pour faire de la figuration. La primaire est un exercice utile, qui permet de faire apparaître différentes sensibilités et il est évident que les débats jouent un rôle particulier : tous les candidats doivent répondre aux mêmes questions et disposent du même temps de parole. C’est différent du reste du temps car, malheureusement, un certain nombre de grands médias ont oublié ce qu’était le pluralisme en donnant beaucoup de temps de parole à certains candidats et en n’en donnant aucun à d’autres. Donc, heureusement pour les citoyens qu’il y a les débats, qui sont des moments qui rassemblent beaucoup de téléspectateurs et qui nous permettent d’exposer nos propositions et nos différences. N’oublions pas également que, comme pour la droite, les gens qui viendront voter à la primaire regardent les débats. C’est unique, c’est vraiment une particularité des primaires.
Quant à moi, j’ai toujours dit que mon but n’était pas d’attaquer ou de dénigrer les autres candidatures, mais d’être le plus clair possible sur mes propositions et de mettre l’écologie au cœur de la discussion. Lorsque j’étais élu local à Nantes, j’ai toujours travaillé et dialogué avec tout le monde. Mais c’est sûr que ce type d’attitude est moins payant que si on est dans la caricature, la posture ou la dénonciation, car on devient alors moins médiatique, on n’est pas considéré comme un "bon client" comme disent les médias. Mais dans un débat, j’espère que c’est plus convaincant. Je ne vais pas faire semblant le temps d’une campagne. Pour proposer et réussir des réformes radicales, il faut être pragmatique et parler avec tout le monde.
Lors du premier débat, vous avez d’ailleurs été félicité sur Twitter par l’ancienne patronne du Medef Laurence Parisot…
D’une manière générale, quels que soient les sujets, je ne change pas de position au gré des échéances. La crédibilité des candidats, me semble-t-il, repose en partie sur la constance avec laquelle ils défendent leurs positions. Or, en matière économique, je n’ai jamais été sur le discours anti-entreprise qui est de bon ton chez une certaine gauche. Si on veut améliorer la qualité de vie au travail, faire tourner l’économie, faire de l’écologie, c’est avec les entreprises. On ne peut pas les ignorer et tirer un trait sur elles, même si, bien sûr, ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas être ferme sur certaines questions.
Concernant l’écologie, on ne peut pas dire que vous ayez réussi à imposer ce thème dans la campagne…
Dès qu’on sort des débats télévisés, on voit bien que certains sujets comme l’écologie ont tendance à disparaître. Il est évident que pour certains candidats, ce thème n’est qu’un chapitre dans un projet, et encore, quand ce chapitre existe. En même temps, je ne suis pas naïf, c’est déjà comme ça à l’Assemblée nationale. C’est un sujet qui a tendance à passer à la trappe. Pourtant, quand je regarde les enjeux devant nous, qui se situent à l’échelle planétaire, quand je vois qu’il y a en France des pics de pollution qui durent dorénavant 30 jours et qui ne sont plus des pics mais des états permanents, le thème de l’écologie me paraît tellement important que je suis quand même étonné qu’il ne prenne pas plus de place dans les débats politiques. C’est pour cette raison que j’ai dit dimanche soir que la classe politique était en retard sur ce que disent et ce que font les Français.