
Plusieurs ONG africaines, réclamant "l'alternance et la démocratie en Afrique", ont publié un rapport dans lequel elles condamnent, entre autres, la politique africaine de François Hollande arrivé vendredi à Bamako pour le sommet Afrique-France.
Le collectif associatif "Tournons la page", qui se présente comme un mouvement citoyen transcontinental composé de plusieurs associations dont "Ca suffit comme ça !" au Gabon ou le Secours catholique français, a organisé, jeudi 12 janvier, un "contre-sommet" Afrique-France à Bamako. Ces militants de la société civile, qui s’estiment mis à l’écart, réclament "l'alternance et la démocratie en Afrique".
Dans la déclaration qu'ils ont adoptée à cette occasion, "ils condamnent pêle-mêle les politiques agricoles et notamment l’accaparement des terres, et réclament plus de transparence dans le domaine minier", rapporte l’envoyé spécial de France 24 à Bamako, Jean Karim Fall. Surtout, ils fustigent la politique africaine de François Hollande, présent vendredi dans la capitale malienne pour l’ouverture du 27e sommet Afrique-France.
"Toutes ces ONG reprochent au président français d’avoir donné la priorité à la sécurité au détriment de la démocratie", explique Jean Karim Fall. François Hollande, pour sa part, a de nouveau qualifié l'Afrique de "priorité pour la France" lors de ses vœux au corps diplomatique à Paris. "C'est un continent qui peut être menacé pour sa sécurité. Il porte donc tous les espoirs du développement, mais il doit être aussi accompagné pour qu'il puisse assurer lui-même sa propre sécurité", a-t-il affirmé.
"On avait espéré qu’il mettrait les pieds dans le plat et irait pour une fois du côté des peuples qui réclament la démocratie. (…) Il n’a pas su le faire, il ne s’est exprimé sur aucune élection présidentielle en Afrique, et les dictateurs sont toujours là, c’est un échec cuisant", affirme la Gabonaise Laurence Ndong, une responsable de "Tournons la page".

"Ce sommet est dépassé"
Plus de 30 chefs d'État et de gouvernement, d'Afrique francophone mais aussi anglophone, sont attendus vendredi soir et samedi à Bamako pour le sommet Afrique-France placé sous le thème du partenariat, de la paix et de l'émergence. En amont, les chefs de la diplomatie ont adopté, vendredi après-midi, le projet de déclaration de Bamako qui sera soumis aux chefs d'État et de gouvernement.
"C'est un projet de déclaration qui met l'accent sur les problèmes africains et sur les solutions également africaines, qui insiste sur les questions de paix et de sécurité, qui insiste sur le partenariat franco-africain", a indiqué le ministre sénégalais des Affaires étrangères, Mankeur Ndiaye.
"Ce sommet Afrique-France est dépassé. Il ne tient pas compte des réalités des peuples africains. La plupart des dirigeants africains participant à ce sommet sont illégitimes", déclare Laurence Ndong à l’AFP. "Le problème de justice sociale est lié à la démocratie. C'est parce que les dictateurs ont les moyens de se maintenir au pouvoir et d'opprimer leurs peuples. Il y a une connivence entre les chefs d'État et les multinationales", a-t-elle dénoncé lors de la présentation du rapport "En Afrique comme ailleurs, pas de démocratie sans justice fiscale !" publié par "Tournons la page". Selon le collectif, cette collusion se traduit par une corruption et une évasion fiscale massives au détriment des citoyens.
"En 2013, les flux illicites qui quittent l'Afrique subsaharienne, sans aucune taxation, s'élèvent à 74 milliards de dollars (près de 70,2 milliards d'euros), un montant presque équivalent à celui des aides internationales et des investissements étrangers officiellement accordés à ces pays", relèvent aussi les auteurs du rapport.
"Prendre l'initiative"
Ils épinglent ainsi "la non-publication de la plupart des contrats pétroliers signés au Congo ou en Angola" ou "l'opacité" de la renégociation des contrats miniers entre le groupe français Areva et l'État du Niger.
Pour les auteurs du rapport, "les pays africains doivent prendre l'initiative de renégocier les traités fiscaux existants, et cesser de signer en l'état les textes qui leur sont proposés". Leur recommandation : que les pays africains chiffrent le coût des incitations fiscales existantes dans chacun des pays et les fassent valider dans le budget annuel par le Parlement.
Avec AFP