Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a présenté jeudi pour la première fois des excuses au sujet de la responsabilité des Nations unies dans l'épidémie de choléra qui a fait plus de 9 300 morts en Haïti depuis 2010.
Des excuses pour Haïti. L'ONU a présenté jeudi 1er décembre pour la première fois des excuses aux Haïtiens pour son rôle dans l'épidémie de choléra qui ravage le pays, sans toutefois reconnaître sa responsabilité juridique. "Au nom des Nations unies, je vais vous le dire très clairement : nous nous excusons auprès du peuple haïtien", a déclaré son secrétaire général Ban Ki-moon, successivement en créole, en français et en anglais, devant l'assemblée générale des Nations unies. "Nous n'avons tout simplement pas fait assez concernant l'épidémie de choléra et sa propagation (…). Nous sommes profondément désolés pour notre rôle", a-til poursuivi.
Selon de nombreux experts indépendants, le choléra a été introduit en Haïti par des Casques bleus népalais de la Mission de l'ONU sur place (Minustah) qui ont déversé leurs déchets dans une rivière.
Pas de responsabilité juridique
Malgré ces excuses, l'organisation internationale maintient qu'elle n'a pas de responsabilité légale dans cette affaire. "Nous n'avons pas changé notre position juridique", a ainsi expliqué à la presse le vice-secrétaire général Jan Eliasson. Ban Ki-moon a répété que l'ONU avait une "responsabilité morale d'agir". Cette affaire, a-t-il reconnu, "a jeté une ombre sur les relations [entre l'ONU et Haïti et a] terni la réputation des Casques bleus".
Il a présenté formellement à l'assemblée un plan pour aider les familles des victimes de l'épidémie et mieux lutter contre la maladie. Celle-ci a déjà contaminé 800 000 personnes, dont 9 000 en sont mortes, depuis octobre 2010.
Pour cette "nouvelle approche", l'ONU espère mobiliser 400 millions de dollars sur deux ans, mais l'argent tarde à venir. L’émissaire onusien a lancé un appel pressant aux donateurs pour financer ces mesures. "Sur l'échelle des besoins humanitaires mondiaux, les sommes nécessaires pour éliminer le choléra en Haïti sont faibles", a-t-il plaidé. "Cette mission est réaliste et réalisable".
Depuis le déclenchement de l'épidémie et les accusations contre leurs Casques bleus, les Nations unies ont toujours plaidé l'immunité diplomatique accordée à leurs missions. Celle-ci a été confirmée par des tribunaux américains, saisis par les avocats de victimes qui réclament des centaines de millions de dollars d'indemnités.
Une "chape de silence"
Lever l'immunité mettrait en péril les opérations de maintien de la paix, a affirmé Jan Eliasson en refusant "d'ouvrir les vannes". "Ce sont de véritables excuses [et Ban Ki-moon] voulait le faire avant de terminer son mandat [dans un mois]", a analysé ce Eliasson.
Philip Alston, rapporteur spécial de l'ONU sur l'extrême pauvreté et les droits de l'homme, estimait récemment que la position de l'ONU était intenable et "affaiblissait sa crédibilité", dénonçant une "chape de silence".
En août, l'ONU avait reconnu pour la première fois son "implication dans le foyer initial" de l'épidémie et promis une "aide matérielle" aux Haïtiens.
Ban Ki-moon a confirmé jeudi que deux programmes étaient prévus, chacun pour 200 millions de dollars. L'un vise à intensifier la lutte contre l'épidémie, qui reprend de l'ampleur après le passage dévastateur de l'ouragan Matthew en octobre, et à améliorer les infrastructures sanitaires catastrophiques du pays. Seul un quart des Haïtiens ont accès à des toilettes décentes et la moitié à de l'eau salubre.
Avec AFP