La Chine est devenue le premier pays à avoir déposé plus d’un million de brevets en un an en 2015, d’après les chiffres de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. Un record qui en dit long sur l’évolution de l’économie chinoise.
Nouveau record du monde pour la Chine. Elle est devenue le premier pays à avoir déposé plus d’un million de brevets en un an, souligne l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), dans son rapport annuel, publié mercredi 23 novembre.
Avec 1 010 406 brevets enregistrés en 2015, la Chine arrive largement en tête du classement, devant les États-Unis et le Japon. Un record important pour un pays considéré il n’y a encore pas si longtemps comme l’usine du monde.
Course aux brevets
Les chiffres fournis à l’OMPI par Pékin sont, certes, à prendre avec des pincettes. La Chine a tendance à surévaluer certaines données jugées stratégiques, les statistiques sont donc gonflées, rappelle le Financial Times. Par ailleurs, il s’agit des dépôts de brevet, ce qui ne signifie pas que tous seront validés par l’autorité chinoise compétente. Tous ces brevets ne sont pas non plus des futurs iPhone en puissance et la “qualité est forcément variable sur un aussi grand nombre”, explique Jean-François Dufour, responsable du China Control Panel du cabinet de conseil Montsalvy consulting, contacté par France 24. Mais, pour lui, “la tendance n’en est pas moins réelle et démontre que l’accent est mis sur l’innovation”.
“Cela illustre l’ambition de Pékin de passer d’une économie du ‘made in China’ au ‘made by China’”, explique cet expert de l’économie chinoise. Pour lui, les autorités partent d’un constat simple : vendre ses propres produits rapporte plus - en termes de marge et de valeur ajoutée - que d’en concevoir pour les autres.
Cette course aux brevets et donc au savoir-faire s’étend à tous les secteurs de l’économie chinoise. “Lorsqu’on regarde le grand nombre de dépôts de dessins industriels, il est évident que l’industrie lourde demeure très importante aux yeux des autorités, mais il y a aussi un certain nombre de brevets dans le domaine de la haute technologie et d’autres qui sont déposés par des grands groupes publics pétrochimiques ou de sidérurgie”, résume Jean-François Dufour.
Culture de la contrefaçon
La quasi totalité - 95 % - des brevets concerne des innovations destinées à être commercialisées sur le territoire national. La Chine se démarque ainsi des autres grandes puissances, dont une part beaucoup plus importante des brevets est déposée, afin que les produits soient protégés lors de leurs exportations.
Cette spécificité ne signifie pas que la Chine ne veut pas aller à la conquête de l’Ouest. “Le marché intérieur est l’un, sinon le plus concurrentiel du monde et les sociétés testent d’abord l’innovation chez eux, en se disant que, si le produit réussit à s’y imposer, il devrait aussi pouvoir le faire à l’étranger”, souligne Jean-François Dufour. Le prix à payer pour déposer un brevet en Chine est aussi moins élevé qu’ailleurs, ce qui contribue à faire du pays un laboratoire intéressant à moindre frais.
Les entrepreneurs chinois sont également conscients de vivre dans un pays, qui a longtemps eu une culture de la contrefaçon. “C’est aussi une manière de se protéger contre ce phénomène toujours présent”, précise l’expert français. Cette préférence nationale dénote ainsi d’une volonté, soutenue par les autorités, de sortir de ce cliché d’un pays dont l’activité se résume à copier les innovations des autres.