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Le financier Bernard Madoff bientôt fixé sur son sort

Le verdict du procès Madoff devrait être connu dans la journée. Le financier américain, âgé de 71 ans, risque jusqu'à 150 ans de prison pour l'organisation d'une escroquerie dont le montant oscille entre 50 et 65 milliards de dollars.

"Je voudrais que Madoff puisse m’aider à porter ce fardeau. Tous les jours, pour moi, c’est la peur, la honte, l’humiliation." Victime de la fraude Madoff, Miriam Siegman attend beaucoup de la confrontation avec le financier, accusé d'une escroquerie évaluée entre 50 et 65 milliards de dollars, prévue ce lundi après-midi au tribunal de district sud de New York.

Miriam Siegman espère comprendre, mais aussi atténuer sa frustration due au fait qu'il n'y ait pas eu de véritable procès. Car en plaidant coupable, Bernard Madoff a évité un procès devant jury, privant ses victimes de la reconnaissance de sa culpabilité. Le juge Denny Chin a donc appelé sept victimes pour leur permettre un face à face avec l'accusé.

Le juge prononcera ensuite le verdict contre "l'escroc du siècle". L’audience, qui débutera à 16 heures (GMT+2), sera précédée par une déclaration de "Bernie Madoff", comme l'appelle ses amis. Au grand dam des victimes, il a été autorisé à porter un costume civil pour l'audience.


Agé de 71 ans, Madoff risque 150 ans de prison, peine requise par le ministère public. Son avocat a plaidé l'indulgence avec une peine de 12 ans de prison, soit un peu moins des "13 ans qui lui restent à vivre". L’avocat invoque en fait des statistiques selon lesquelles la durée de vie des Américains est de 84 ans.


Par ailleurs, le juge a publié un mandat préalable autorisant la confiscation des biens de Madoff à hauteur de 170 milliards de dollars. Son épouse Ruth Madoff, qui a indiqué ne pas pouvoir être présente pendant l'énoncé du verdict, a abandonné son appartement de Manhattan et quelques autres bijoux et actifs d’une valeur de 80 millions de dollars, ce qui devrait lui laisser 2,5 millions de dollars pour vivre.


Les victimes vont récupérer entre 3 à 10 % de leur investissement

Ancien président du conseil d'administration du Nasdaq, Bernard Madoff avait plaidé coupable en mars de 11 chefs d'inculpation, dont fraude, parjure, blanchiment d'argent et vol. Le matricule 61727-054 est incarcéré depuis le 12 mars, loin de son luxueux appartement de l'Upper East Side de Manhattan.

Madoff a avoué n'avoir jamais investi un seul dollar des sommes reçues. Il avait monté un "schéma de Ponzi" - du nom de l'un de ses prédécesseurs des années 1920 -, une cavalerie financière consistant à rémunérer les investisseurs avec l'argent déposé par de nouveaux clients. La fraude a été révélée avec l'explosion des retraits provoquée par la crise financière de l'automne.
 

"La plupart des victimes ont perdu toutes leurs économies. Certaines personnes à la retraite ont été contraintes de retourner travailler", précise Romain Gubert, co-auteur du livre "Et surtout n’en parlez à personne".


Certains épargnants floués ne retrouveront pas la totalité de leur argent. "Très peu d’entre eux étaient assurés. Au mieux, certains investisseurs directs étaient assurés à hauteur de 500 000 dollars, commente Romain Gubert, mais cet argent sera difficile à récupérer. D’autres vont chercher à se faire rembourser auprès des intermédiaires qui récoltaient l’argent pour Madoff et qui sont considérés comme des complices. On estime que les victimes vont récupérer entre 3 à 10 % de ce qu’elles ont investi."


"L’affaire ne fait que commencer"


Quelle que soit la peine, l’affaire ne fait que commencer. "Nous ne sommes qu’au tout début de cette affaire. Le véritable enjeu, c’est de savoir qui a coopéré avec Madoff, qui lui a permis de réaliser la plus grande escroquerie pyramidale de tous les temps, commente Helen Chaitman, avocate en fraude boursière et victime de Madoff. J’ai bon espoir que dans un ou deux ans, le département de la justice avancera un réquisitoire qui marquera les esprits à travers le pays."


Au total, selon les enquêteurs, 13 milliards de dollars ont été confiés à Madoff depuis une vingtaine d’années par des banques, des particuliers aisés du monde entier mais aussi des fonds d'investissements et des organisations caritatives. Mais, selon les estimations, les pertes se chiffreraient entre 50 et 65 milliards de dollars, correspondant aux gains qu'auraient engendrés les sommes prêtées si les intérêts avaient été réels. Face au désastre, certaines de ses victimes se sont suicidées.


L’enquête continue, notamment pour savoir ce qui s’est passé au 17e étage du Lipstick Building, le siège de Bernard L. Madoff Investment Securities. Les enquêteurs s’intéressent notamment à Franck DiPascali, qui lui a confectionné pendant des années les faux relevés de compte envoyé aux clients.