
Les candidatures de Benoît Hamon, Cécile Duflot et Arnaud Montebourg, tous unis dans leur opposition à François Hollande, viennent confirmer, s’il en était encore besoin, l’état de division de la gauche française.
La fin de l’été est traditionnellement marquée par les universités d’été des différents partis qui animent le paysage politique français. Mais pour la première fois depuis 1992, le Parti socialiste n’organisera pas la sienne. Après vingt-deux éditions à La Rochelle, celle-ci devait se tenir du 26 au 28 août 2016 à Nantes. Mais elle a fini par être purement et simplement annulée, officiellement en raison des "risques de violences" liés à la contestation sociale du printemps. Une autre explication, officieuse mais tout aussi plausible, pourrait être celle des divisions de la gauche et de la crainte suscitée par le pouvoir de nuisance des "frondeurs", ce groupe d’élus opposés à la ligne économique sociale-libérale adoptée par le gouvernement.
L’opposition à François Hollande vient d’ailleurs de passer un cap. En moins d’une semaine, ce sont ainsi trois anciens ministres du président de la République qui ont annoncé leur candidature à l’élection présidentielle de 2017. Benoît Hamon s’est déclaré, mardi 16 août, dans le cadre de la primaire de la gauche de gouvernement. Cécile Duflot a annoncé sa candidature, samedi 20 août, à la primaire d’Europe Écologie-Les Verts (EELV). Et, Arnaud Montebourg est officiellement devenu candidat, dimanche 21 août, sans toutefois préciser s’il participerait à la primaire du PS ou s’il se présenterait directement à la présidentielle.
Ces candidatures rejoignent celles de Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche, François de Rugy et Jean-Luc Bennahmias pour la primaire de la gauche de gouvernement et de Michèle Rivasi et Yannick Jadot pour la primaire d’EELV. Sans oublier la candidature de Jean-Luc Mélenchon, une autre possible communiste, ainsi que celle éventuelle d’Emmanuel Macron qui paraît de plus en plus tenté de se jeter dans la course, en attendant, enfin, celle de François Hollande qui en a "l'envie" mais qui attend le mois de décembre pour se déclarer.
"Cela fait beaucoup de monde, mais il ne faut pas mettre tous ces gens au même niveau, tempère le politologue et professeur à Sciences-Po Paris Thomas Guénolé. Il y a quelques candidats qui jouent la gagne et d’autres qui essaient juste de se placer et de se faire connaître. Marie-Noëlle Lienemann ou Gérard Filoche n’ont aucune notoriété auprès des Français. Leurs candidatures n’existent pas vraiment."
Les frondeurs bientôt ralliés à la candidature Montebourg ?
Si Cécile Duflot devrait logiquement et sans grande difficulté l’emporter chez EELV, la situation chez les "frondeurs" du PS apparaît moins claire. Ces derniers doivent se réunir les 10 et 11 septembre à La Rochelle. "Notre objectif est de construire une candidature unique pour représenter à la primaire tous ceux qui veulent un changement", affirmait dans Le Monde, le 16 août, l’un de leurs principaux représentants, le député de la Nièvre Christian Paul. Mais après la démonstration de force de l’ancien ministre de l’Économie, dimanche 21 août à Frangy-en-Bresse, ces élus frondeurs ont-ils désormais un autre choix que de soutenir Arnaud Montebourg ?
"On pourrait penser que Benoît Hamon, lui aussi ancien ministre et assez médiatisé, puisse être considéré comme leur représentant potentiel, mais il ne fait pas le poids face à Montebourg, juge Thomas Guénolé. La marque Hamon ne signifie rien de précis à ce jour. À part le fait de vouloir mener une politique plus à gauche, il n’y a pas de contenu, son message n’est pas connu, contrairement à celui de Montebourg qui représente le 'made in France', une politique keynésienne de la relance ou encore la VIe République."
La principale inconnue concerne finalement le chemin qu’empruntera l’ancien député de Saône-et-Loire. Son discours, dimanche, a montré qu’il souhaitait clairement prendre la place de François Hollande comme le représentant du Parti socialiste.
"Je lui demande de bien réfléchir à sa décision, de bien considérer les faits, de prendre en compte l’intérêt général du pays, la faiblesse inédite et historique qui est la sienne au regard des Français, d’affronter sa conscience et sa responsabilité, et de prendre la décision qui s’impose", a-t-il déclaré en s’adressant d’égal à égal à François Hollande après avoir évoqué le bilan "pas défendable" du quinquennat.
Si d’aventure le chef de l’État se présentait pour un second mandat, Arnaud Montebourg pourrait alors décider de se lancer seul dans la course à l’Élysée, sans passer par la case primaire, et venir gonfler un peu plus le nombre de bulletins de gauche présents au premier tour en 2017.