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Génocide arménien : protection policière pour des élus allemands d'origine turque

Onze jours après avoir voté en faveur d’une résolution reconnaissant le génocide arménien, des députés allemands d’origine turque ont été placés sous protection policière après avoir reçu des menaces de mort, a déclaré un élu dimanche.

La Turquie, terre de leurs ancêtres, leur semble brusquement moins accueillante. Onze élus du Bundestag (la chambre basse du Parlement allemand) d’origine turque ont été placés sous protection de la police, suite à la reconnaissance du génocide arménien par les députés, a déclaré un élu, dimanche 12 juin.

Deux jours plus tôt, les édiles s'étaient vu déconseiller de se rendre en Turquie par le ministère allemand des Affaires étrangères. Ils avaient reçu des menaces de mort en raison de leur décision de voter en faveur d’une résolution reconnaissant le génocide arménien, adoptée jeudi 2 juin.

Une situation insupportable pour Aydan Özouz, commissaire allemande à l’intégration : "C’est épouvantable de savoir qu’il n’est pas possible d’aller là-bas", s’est-elle émue au cours d’une interview au quotidien allemand.

Les menaces de mort contre les députés semblent faire écho aux déclarations incendiaires du président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui avait taxé les parlementaires en question de "bras prolongés des terroristes", en allusion aux rebelles kurdes. Avant d’évoquer, le 8 juin, la nécessité de leur donner "la leçon qu'ils méritent".

"Appels au meurtre"

Le coprésident du groupe écologiste au Bundestag, Cem Özdemir, l’un des auteurs du texte, a dénoncé les propos du chef d’État turc, les qualifiant à demi-mot d’"appels au meurtre". "On n'a pas à trouver cette résolution bonne. (…) Mais les organisations turques doivent condamner sans équivoque les appels au meurtre."

Cem Özdemir et Aydan Özouz ont tous deux tenu bon, et placé leur citoyenneté allemande devant leurs origines turques. "Les votes du Parlement allemand ne dépendent pas de ce qui plaît ou ne plaît pas à un dirigeant autoritaire", a martelé le premier en faisant allusion aux dérives de Recep Tayyip Erdogan. "Il ne faut pas faire de confusion, a quant à elle prévenu Aydan Özouz : je suis députée pour les gens d'ici. Je ne fais pas de politique pour la population turque."

Un million et demi de victimes

Outre ces menaces, Cem Özdemir a également subi un rejet symbolique : selon les Nouvelles d’Arménie, il pourrait perdre le titre de citoyen d’honneur de la ville natale de son père, Pazar, dans la province turque du nord de Tokat. "Nous ne reconnaissons pas la décision du Parlement allemand sur la résolution", a déclaré le maire de la ville, Şerafettin Pervanlar, qui compterait offrir à la place le titre honorifique à l’unique députée allemande à s’être opposé au texte, Bettina Kudla.

Alors que nombre d'historiens et plus de vingt pays, dont la France, l'Italie et la Russie ont reconnu que près d’un million et demi d’Arméniens ont été victime d’un génocide de la part de l’armée ottomane au début du XXe siècle, la Turquie n'a cessé de rejeter ces accusations. Ankara considère ces événements tragiques comme une guerre civile doublée d'une famine, au cours de laquelle 300 000 à 500 000 Arméniens et autant de Turcs ont trouvé la mort.