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L'ONU a cédé, lundi, à la pression de Riyad en retirant la coalition militaire arabe, opérant au Yémen sous commandement saoudien, d'une liste noire de pays et organisations violant les droits des enfants.

La pression exercée par Riyad a eu raison de l'ONU, qui a retiré, lundi 6 juin, la coalition militaire pilotée par l’Arabie saoudite au Yémen d'une liste noire de pays et organisations qui tuent des enfants dans les conflits.

Selon le porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric, l'ONU et Riyad vont "revoir conjointement" le contenu du rapport qui accuse la coalition. "En attendant les conclusions de cette révision conjointe, le secrétaire général de l'ONU (Ban Ki-moon) retire la coalition de la liste annexée au rapport", a précisé le porte-parole.

Près de 800 enfants tués en 2015 au Yémen

L'ambassadeur saoudien Abdallah al-Mouallimi s'est immédiatement réjoui devant la presse de cette décision qui "donne clairement raison à l'Arabie saoudite et à la coalition". Il a affirmé que malgré le processus de révision annoncé, le retrait de la liste "est irréversible et sans conditions".

Stéphane Dujarric avait cependant affirmé, peu avant, que si l'ONU était prête à "changer le format" du rapport, pour éviter de mettre sur le même plan des États membres comme l'Arabie saoudite et des "groupes terroristes" coupables d'exactions contre des enfants, elle n'entendait pas modifier le contenu du rapport.

Dans ce rapport annuel qui détaille le sort des enfants victimes de conflits armés en 2015 dans 14 pays, l'ONU avait accusé la coalition d'être responsable à 60 % du bilan de 785 enfants tués et 1 168 mineurs blessés en 2015 au Yémen. "Dans plusieurs situations de conflit, des opérations aériennes ont contribué à créer un environnement complexe où de nombreux enfants ont été tués et blessés", avait déploré Leila Zerrougui, la représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés de l'ONU.

Les exigences de Riyad

Ce chiffre de 60 % "est très largement exagéré", avait affirmé lundi l'ambassadeur saoudien. Il avait exigé que le rapport "soit rectifié immédiatement" et expurgé de toute accusation contre la monarchie wahhabite. "Il a pu y avoir des dommages collatéraux de temps à autre [mais] c'est ce qui se passe en temps de guerre", avait-il plaidé.

Il avait surtout brandi la menace d'un échec des négociations de paix en cours au Koweït, sous l'égide de l'ONU, entre le gouvernement yéménite soutenu par la coalition et les rebelles chiites houthis.

"Publier un tel rapport en ce moment ne peut être que contre-productif pour les négociations", avait-il affirmé. Le rapport doit être présenté formellement au Conseil de sécurité au mois d'août.

L'ONG de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HWR) a accusé Ban Ki-moon d'avoir capitulé sous la pression de l'Arabie saoudite en acceptant de retirer la coalition menée par Ryad de la liste noire. HWR a souligné que l'ONU elle-même avait abondamment documenté les frappes aériennes contre des écoles et des hôpitaux au Yémen.

"Comme cette liste fait place à la manipulation politique, elle perd sa crédibilité et ternit le bilan du secrétaire général dans le domaine des droits de l'Homme", a déclaré le directeur adjoint de HRW, Philippe Bolopion.

Depuis le début de l'intervention de la coalition, la guerre au Yémen entre les forces gouvernementales soutenues par Riyad et les rebelles, accusés de liens avec l'Iran, a fait plus de 6 400 morts, selon l'ONU.

Avec AFP